Fait d'images

le blog de françois forcadell – l'image dessinée dans l'actualité

Archive pour février 2009

« Bête, méchant et hebdomadaire » : une suite

vendredi 13 février 2009

Stéphane Mazurier - Des cadres noirs dans son livreLes lecteurs de l’énorme pavé de Stéphane Mazurier sur l’histoire de Charlie Hebdo (1969 – 1982) – voir note de lecture sur ce blog -, ont du être intrigués par les pavés noirs qui figurent sur la reproduction des pages du journal. En fait, se sont les dessinateurs Cabu et Wolinski qui se sont opposés à la publication de leurs œuvres dans un livre qui fait un portrait trop flatteur – à leur goût – de Georges Bernier, alias Pr. Choron.

Quand on voit la couverture du livre, avec Cavanna et Choron photographiés amicalement enlacés par Arnaud Baumann, on se dit qu’il doit régner un certain malaise dans la rédaction de Charlie Hebdo (celui de 2009).

Extrait du livre :

« Des fois, j’envie Reiser. Il ne nous a pas vus devenir moches et cons. Il ne l’est pas devenu non plus. Il a tracé sa trajectoire d’angelot bouclé, frrrt, il n’a pas vu le monde vieillir, il n’a pas vu sa gueule grimacer dans la gueule des copains ».

Ces lignes ont été écrites par Cavanna en 2004.

Autre chose, la mention d’un copyright « Glénat Éditions – Drugstore 2008 », sur la reproduction de Unes de L’hebdo Hara-Kiri et de Charlie Hebdo dessinées par Reiser. Une réappropriation étonnante de la part d’un éditeur, en effet si le copyright peut s’appliquer sur le dessin de Reiser, il ne peut en aucun cas concerner la Une qui est une œuvre collective appartenant au journal.

Note de lecture : Charlie Hebdo, l’original

jeudi 12 février 2009

Bête, méchant et hebdomadaire. un livre de Stéphane MazurierCréer et faire vivre un journal est une aventure formidable. Créer et faire vivre un journal comme Charlie Hebdo est une aventure « extraordinaire » comme le dit Sylvie Caster. Pour s’en convaincre il suffit de lire l’imposant – 512 pages – Bête, méchant et hebdomadaire de Stéphane Mazurier (Buchet Chastel) qui retrace les grands et les petits moments de Charlie Hebdo, titre satirique légendaire, anticonformiste, aujourd’hui usurpé par un propriétaire qui s’affiche comme « éditorialiste » sur les plateaux télé entre Alain Duhamel et Catherine Nay.

Un livre très documenté et très complet sur la vie de ce journal de 1969 à 1982, mais aussi sur son époque qui joua un rôle non négligeable dans son succès (et son déclin) : « Expérience unique dans l’histoire récente de la presse française, Charlie Hebdo se révèle finalement la meilleure expression journalistique de l’esprit de mai 68 ». Bénéficiant des témoignages de nombre des collaborateurs, l’auteur évoque les multiples péripéties des titres, le mensuel Hara-Kiri, L’hebdo Hara-Kiri Charlie Hebdo, l’éphémère Charlie matin, La semaine de Charlie, et la cohabitation – souvent conflictuelle (p. 150) – entre des personnalités aussi fortes que celles de Gébé, Reiser, Delfeil de Ton, Fournier, Wolinski, Siné, Willem, Cabu, Nicoulaud, Berroyer, Carali, Arthur, Sylvie Caster. Le tour de force a été d’additionner tous ses talents chaque semaine, mais avec une règle : « même si les collaborateurs du journal s’apprécient profondément, ils se fréquentent très peu en dehors du journal. Certes Reiser dîne quelquefois chez Wolinski, mais la règle est de ne se voir que pour le travail ». 

Ce livre ne dévoile hélas aucun secret permettant de renouveler cette aventure, mais donne quelques clés qui permettraient à une équipe de se lancer dans un tel projet. Cavanna : « C’est très simple, la formule c’était : tu as une page, tu t’en démerdes, tu mets ce que tu veux dedans, pourvu que ce soit génial »

Autre intérêt de l’ouvrage, c’est qu’il confirme, s’il en était besoin, que sans le duo passionnel Cavanna-Bernier cette aventure fulgurante n’aurait jamais pu exister : « Cavanna est, sans aucun doute, le « concepteur en chef » du journal. C’est lui qui a su imaginer une formule originale et viable, mais aussi la maquette, autrement dit la marque de fabrique, le « visage rédactionnel » de Charlie Hebdo. Le deuxième personnage clé dans l’élaboration du journal est , bien sûr, son directeur, Georges Bernier. Si Cavanna est le concepteur du journal, Bernier en est l’administrateur ; un administrateur volontiers fantasque et téméraire, qui s’acharne à faire vivre Charlie Hebdo. Bernier a, en quelque sorte, mis en place sa propre méthode, fondée sur l’optimisme et la ténacité. »

Un Bernier incontournable, au point même qu’il semble aujourd’hui étonnant qu’un dessinateur comme Cabu, qui a vécu et profité (p. 110) de toutes ces années tumultueuses, retrouve subitement la mémoire pour accabler et dénoncer le Pr. Choron comme il l’a fait dans un récent de Charlie Hebdo (14.1.2009). Il est vrai que le Charlie Hebdo de l’époque est très éloigné de celui qu’il fait aujourd’hui et dont il est curieusement l’actionnaire principal avec Philippe Val. Rien à voir donc, avec le titre d’origine où le rédacteur en chef était « toute la bande ». On en est loin en effet et on se demande même pourquoi dans ce livre Philippe Val donne son avis sur la première version de Charlie Hebdo alors qu’il n’y a jamais participé et qu’il ne reconnaît aucun talent à Choron.

Au final, ce livre pourrait apparaître comme une sorte de pierre tombale, une fresque gravée dans le marbre, qui célèbre le souvenir, la nostalgie d’une époque révolue où l’on osait tout et où tout était possible. Mais c’est une fausse impression, puisqu’encore récemment avec l’arrivée dans les kiosques de Siné Hebdo, journal conçu en quelques semaines, il semble que l’esprit de provocation reste vivace. Il suffit juste de le cultiver. Bête, méchant et hebdomadaire de Stéphane Mazurier peut donner cette envie. ff

Bonus à savourer également, le cahier spécial des photos d’époque d’Arnaud Baumann qui signe aussi la photo de couverture.

Des images habitées

mercredi 11 février 2009

Affiche vente Dal 2009Logo DALLa vente aux enchères de dessins originaux organisée depuis 9 ans en faveur de l’association du D.A.L. (Droit Au Logement) aura lieu le samedi 7 mars 2009 au centre culturel La Clef, à Paris. 

À noter que cette année la photo est intégrée à l’événement : photos de Bruno Calendini, Raymond Depardon, Dityvon, Rip Hopkins, William Klein, Eve Morcrette, Bernard Plossu, Marcel Riboud, Toshio Shimanura, Pierre Terrasson, Sabine Weiss.

Parmi les dessinateurs on peut citer : Bilal, Florence Cestac, Jean-Yves Ferri, F’Murr, Guarnido, Emmanuel Guibert, Loustal, M-A Matthieu, Miss Tic, Moëbius, Pétillon, Tardi.

Vente à 14 h pour les photographies et à 16 h pour les dessins. 

Elles seront animées par Yves Frémion et Éric Dumeyniou (commissaire-priseur).

L’intégralité des bénéfices de la vente est reversée à l’association Droit Au logement (DAL).

Centre Culturel la Clef, 21 rue de la Clef, 75005 Paris (Métro : Censier-Daubenton).

Les dessins et photographies seront visibles de 10 h à 12 h 30 à cette même adresse.

Procès Colonna, la suite

lundi 9 février 2009

Dessin de Tignous : Le procès ColonnaLe dessinateur Tignous va suivre dès le 9 février et pour Charlie Hebdo, le procès en appel de Yvan Colonna, condamné en 2007 à la réclusion criminelle à perpétuité pour l’assassinat du Préfet Érignac.

Le compte-rendu des cinq semaines du premier procès avait donné lieu à un album de 120 pages, Le procès Colonna, paru aux éditions 12bis. Ce livre constituait une grande première, car les dessins de Tignous et les textes de Dominique Paganelli rendaient compte fidèlement de l’ensemble des audiences. Il se dit même que l’ouvrage a failli être versé dans les pièces du procès en appel par une des parties.  D’ailleurs, ce livre document a reçu en janvier 2009 le 15e Prix France Info de la Bande Dessinée d’actualité et de reportage.

Voilà ce qu’en on dit deux journalistes. Philippe Cohen de Marianne :

« Au-delà de la question corse, d’autres enjeux ont traversé les audiences : le fonctionnement de la police, de la justice et des médias furent au cœur des débats. Et surtout, le livre donne à voir des hommes habités par des passions, des convictions et des doutes, des hommes aussi, qui jouent avec la vérité comme un chat avec une pelote de laine. Le trait de Tignous traduit admirablement leur désir de sincérité. Et pourtant, il y a forcément des mensonges, donc des menteurs, à ce procès. Nous lecteurs, sommes comme dans un fauteuil de juré. Pas facile, comme position. Mais terriblement instructif. »

Dessin de Tignous : Le procès Colonna

Et Éric Pelletier sur le site de TV5 monde :

« Les auteurs en brossent un tableau dense et inédit, jusqu’à la condamnation du nationaliste à la réclusion criminelle à perpétuité pour l’assassinat du préfet de Corse Claude Érignac. Ils croquent ces instants avec une affection particulière pour les seconds rôles : greffiers, gendarmes ou avocate stagiaire. Phrases, tranchantes comme des rasoirs, prononcées à la barre ou «brèves de comptoir» du public : par une porte dérobée, le lecteur se glisse dans les coulisses d’un des plus grands procès d’assises de ces dernières années. »

Illustrations : extraits de l’album publié par les éditions 12bis.

Daullé, le retour

dimanche 8 février 2009

Caricatures des politiques de Daulle

Thierry Breton par Daullé

 

On a beaucoup vu sa signature dans la presse des années 80 et il a été un des fondateurs de l’association Un bon dessin vaut mieux qu’un long discours.

Après un long intermède où il a pris un peu de distance avec le métier, – mais le dessin c’est comme le vélo cela ne s’oublie jamais –  on retrouve aujourd‘hui avec plaisir la signature de Daullé, notamment sur le site du Journal du Net.com où il propose une galerie de caricatures des vingt derniers ministres de l’Économie en  France : de Jean-Pierre Fourcade à Christine Lagarde.

 

Illustration : Thierry Breton © Daullé

Interdiction Suisse

samedi 7 février 2009

dessin de Willem interdit en SuisseLe site ActuaBD.com nous apprend que le numéro de février de L’Écho des Savanes (Glénat) ne sera pas distribué en Suisse en raison de la publication du dessin de Willem ci-contre (âmes sensibles s’abstenir. À lire également sur ActuaBD.com les réactions des Internautes). On découvre aussi à cette occasion les particularités du Code Pénal Suisse et de son article 197.

Ce n’est pas la première fois qu’un dessin de Willem provoque des remous. Pour la petite histoire, c’est déjà plusieurs de ses dessins (avec un dessin de Cabu) qui ont servi de prétexte « officiel » en 1970 à l’interdiction de l’hebdo Hara-Kiri pour « pornographie » car on apercevait des sexes dans ses pages.

Le parcours éditorial et artistique de Willem est d’ailleurs jalonné de multiples réactions indignées, d’interdictions en tous genres, dues à la diffusion de ses dessins. Les atteintes à la religion sont d’ailleurs les motifs les plus souvent invoqués dans les nombreux procès intentés à cet immense dessinateur. 

Illustration : © Willem / L’Écho des Savanes.