Fait d'images

le blog de françois forcadell – l'image dessinée dans l'actualité

Archive pour la catégorie ‘Humeur’

Ni fesses ni chons sur Facebook ?

vendredi 5 octobre 2012

Facebook est un réseau social utilisé par un milliard (paraît-il) de personnes à travers le monde. On peut y publier des banalités entre amis, comme des messages plus pertinents, mais à priori pas d’images de sexe, fesses, seins, bites, couilles, etc.. Deux épisodes récents viennent de confirmer cette pruderie. Le premier est raconté par le site Numerama.com (repris par Caricatures & caricature). Extrait :

[…] « C’est la mésaventure qui est arrivée récemment au célèbre magazine américain The New Yorker. Celui-ci dispose d’une page sur Facebook où l’internaute peut voir de nombreux dessins de presse publiés par l’hebdomadaire depuis les années 1930. La dernière d’entre elle représente Adam et Ève adossé à un pommier, en train de discuter (en illustration). Et c’est ce dessin-là qui a posé problème.
Ce dessin a été en effet le motif qui a conduit Facebook à bannir la page Facebook du New Yorker. Pourquoi ? Car le dessin révèle la poitrine nue d’Ève, ce qui constitue, selon les modérateurs, une infraction des règles du réseau social. Soucieux de ne pas se froisser avec le réseau social, le dessinateur Mick Stevens a proposé une version corrigée : il a rhabillé Adam et Ève, amoindrissant ainsi la portée de son message. » […]

La deuxième affaire est lié aux récentes caricatures de Charlie Hebdo sur Mahomet et concerne Le Point. L’hebdomadaire pour avoir reproduit sur son compte FaceBook le dessin de Luz (en illustration), a vu sa page censurée.  Extrait de l’article de l’AFP et du Point qui raconte l’histoire :

[…] « Dans cette caricature du prophète, inspirée de Brigitte Bardot dans le film Le Mépris, on peut voir Mahomet langoureusement allongé sur un lit qui demande « Et mes fesses, tu les aimes, mes fesses ? ». « Moins d’une heure plus tard, le post est supprimé par Facebook et notre administrateur reçoit un message d’avertissement : le contenu publié n’est pas conforme au règlement en vigueur sur le site communautaire. En conséquence de quoi notre administrateur est interdit de Facebook 72 heures durant », indique Le Point.fr dans un article expliquant la mésaventure.  « On regrettera alors que la pudibonderie – s’il ne s’agit que de cela – s’exerce sur le compte professionnel des rédactions plutôt que sur les nombreux comptes individuels complètement dénués de pudeur», estime le site internet de l’hebdomadaire. Jeudi en début d’après-midi, la page Facebook du Point était visible, a constaté l’AFP. Aucun responsable de la rédaction n’était joignable dans l’immédiat. Chez Facebook, on précise que « toutes les pages sont traitées de la même manière», que ce soit celle d’une rédaction ou d’un particulier. » […]

Le dessin satirique est-il si ringard que ça ?

mercredi 5 septembre 2012

Trop méchant, trop cynique, trop dérangeant, trop militant, trop vieillot ? Il faut se rendre à l’évidence le dessin satirique, le dessin d’opinion, n’a plus vraiment la cote dans les médias, et si quelques journaux « spécialisés » continuent à en publier on ne peut pas dire que l’engouement du public se traduise dans les chiffres de ventes.

Même le pourtant réactionnaire Figaro n’a pas jugé bon de remplacer son « éditorialiste » Jacques Faizant disparu en 2006, et on ne sait pas encore si Sud Ouest trouvera un remplaçant à Iturria parti à la retraite cet été après 40 ans de collaboration. Et les télés ? Si beaucoup reconnaissent l’apport des dessins au ton iconoclaste de Droit de réponse de Michel Polac, depuis sa disparition en 1987 aucune émission n’a repris le concept. Aucune télévision n’utilise d’ailleurs le dessin satirique à l’antenne. L’humour et l’ironie sont partout, la caricature nulle part.

La tendance du dessin aujourd’hui dans la presse est à l’illustration, substitut original à la photo. On ne demande plus aux dessinateurs de s’exprimer mais de réaliser une composition graphique qui agrémentera – dans le format imparti – l’article qui le côtoie. Une aubaine pour le métier d’illustrateur, encore faut-il savoir que celui-ci est pas mal pratiqué et que, entre les élèves d’écoles d’Art en mal de débouchés professionnels, les dessinateurs de bande dessinées en panne d’album, les illustrateurs dont c’est la profession et à qui on ne pense pas forcément, sans oublier le neveu du rédacteur-en-chef qui dessine lui aussi, on se bouscule pas mal au guichet d’entrée.

La satire est un mode d’expression qui a traversé les siècles, et nul doute que le mauvais esprit a encore de beaux jours devant lui. La caricature aussi, cette façon de forcer le trait pour mieux montrer, ou démontrer ce qui ne va pas est pratiquée depuis la nuit des temps. On peut avoir des doutes pour le dessin satirique, même s’il a de nombreux atouts.

Lorsqu’il est écrit qu’un bon dessin vaut mieux qu’un long discours, cela veut dire qu’un bon dessin – intelligent, malin, lisible (il peut être beau aussi) – ne ment pas, contrairement aux torrents de mots, de phrases, d’idées foireuses, d’articles de circonstance, de promesses à géométrie variable, qui peuvent facilement nous manipuler.

Le langage du (bon) dessin est lui immédiat et universel. Comment alors expliquer ce désintérêt et à qui la faute ? Ces dernières décennies les moyens de communication et d’expression ont évolué à une vitesse vertigineuse, video, multiplication des télévisions, Internet, smartphones. Les mentalités aussi. Le dessin satirique, lui, se pratique encore comme on le faisait dans les années 1970, avec ses stéréotypes, ses codes de lecture, souvent abscons pour le commun des lecteurs. D’ailleurs il faut bien constater que le dernier carré de supporters de journaux satiriques se compose en majorité des heureux rescapés de cette période. Les nouvelles générations s’éclatent (expression d’époque) elles, sur Internet ou pratiquent la dérision tous azimuts sur Twitter ou Facebook.

Et si quelques sites Internet de presse ouvrent leurs pages au dessin « satirique » il faut là aussi constater – malgré quelques exceptions – que le critère n’est pas toujours la pertinence, ni la qualité du propos (même édulcoré), mais bien le tarif dérisoire – quand il y en a un – que l’auteur accepte pour être publié.

Alors quelle solution à ce problème (cependant moins grave que Fukushima ou la Syrie) ? Aucune, ou mutiples. Il suffirait peut-être aux dessinateurs d’imaginer, de réinventer leurs supports, de réaffirmer la qualité du trait et l’originalité de l’expression, comme l’ont fait en leur temps les créateurs de journaux indépendants. De retrouver une liberté qui leur permettrait d’exprimer pleinement tout leur talent et de donner une nouvelle image de leur savoir faire. La création c’est beaucoup de boulot mais elle fait partie de l’ADN du métier et il n’est jamais trop tard pour commencer. ff

Les commentaires et réactions à ce texte seront publiés sur ce blog.

Siné mensuel en musique

mardi 3 avril 2012

Jiho, Berth, Puig Rosado, Mric, Faujour, Siné, sont les dessinateurs qui ont participé à la chorale de Siné mensuel, interprète inoubliable et enthousiaste de « La France forte !», chanson écrite et mise en musique par Etienne Liebig.

A voir, à écouter, à voir, et à reprendre en chœur sur Youtube.com et la version karaoké

Plantu et les intégristes religieux

samedi 25 février 2012

France Info a consacré un reportage à la rencontre du dessinateur Plantu avec le président de la République tunisienne, Moncef Marzouki, « suite à une invitation de ce dernier à parler de quelques uns de ses dessins. »

Selon la radio « Plantu a souvent dessiné ces derniers temps en une du journal Le Monde, la montée des extrémismes au Maghreb, suite aux révolutions arabes. Le président Marzouki a souhaité s’entrenir avec lui. Les deux hommes souhaitent d’ailleurs mettre en place une antenne de Cartooning for Peace qui réunirait les dessinateurs de presse de la région. La démocratie progresse mais le salafisme est pour Plantu une menace à la liberté d’expression pour laquelle il se bat au sein de cette association. »

Reportage à écouter sur le site Internet de France Info. 

En illustration, dessin publié sur le site de Cartooning for Peace.

A noter, par ailleurs, que Plantu fait également l’objet d’une plainte de l’Alliance générale contre le racisme et le respect de l’identité française et chrétienne (Agrif). Le Figaro :

« Le parquet de Paris a requis le 8 février le renvoi en correctionnelle du dessinateur, ainsi que celui d’Eric Fottorino, l’ancien directeur de la publication du Monde Magazine qui avait publié ce dessin controversé en avril 2010. […] Intitulé “Pédophilie : le pape prend position”, le dessin, qui avait été publié le 22 mars 2010 sur le site du dessinateur et repris le 3 avril suivant par Le Monde Magazine, mettait en scène le pape sodomisant un enfant qui déclarait : “Quitte à se faire enculer, autant aller voter dimanche!”. Cette phrase faisait référence aux élections régionales. »

Gillray*, un espoir du dessin de presse

samedi 28 janvier 2012

Une bonne polémique est toujours intéressante, surtout lorsqu’elle touche un domaine aussi mal considéré que le dessin de presse. Pascal Dupuy et Guillaume Doizy ont été semble-t-il piqués au vif par l’article que j’ai consacré au numéro de la revue TDC dont ils sont les maîtres d’œuvres (voir blog du 26.1.2012). Pourtant l’article ne contenait aucune charge contre eux mais la simple constatation qu’il était plus facile à propos du dessin de presse, de publier des études sur son histoire que sur sa réalité d’aujourd’hui. Les raisons en sont simples les caricatures des siècles passés ne dérangent plus personne, elles ont beau être montrées en exemple, leur sens est rarement accessible aux publics d’aujourd’hui.

L’essence même de ce métier, qui allie réflexion et graphisme, est de stimuler l’esprit de chacun, voire de déranger parfois, en nous révélant par l’humour ou l’exagération du trait (la caricature), des choses que nous aurions mal perçues. Pour exister le dessin doit être en résonance avec ses lecteurs et son époque.

Contrairement au titre ambigüe du billet « Histoire et caricature : François Forcadell : le droit à l’oubli » (je suis à deux doigts du révisionnisme…), je considère que le travail des caricaturistes anciens est remarquable, d’ailleurs le dessinateur Solo a su montrer dans ses publications la continuité de ce métier à travers les siècles. Personne n’osera contredire le fait que des dessinateurs comme Cabu, Willem, Cardon, entre autres, sont les héritiers de Daumier, Gill, ou Jossot, mais force est de constater que le passé intéresse beaucoup plus les médias, les établissements culturels, et les spécialistes.

Pascal Dupuy  et Guillaume Doizy écrivent « Ce numéro de TDC ne se fixait pas pour but de « transmettre aux jeunes l’envie de s’intéresser au dessin satirique », mais justement, de montrer à ces jeunes comment, dans le passé, les générations précédentes se sont emparées de l’image satirique et se sont servies de sa puissance pour défendre des opinions, leurs opinions, leurs visions du monde, leurs idéaux. »

C’est, il me semble, ce que font nombre de dessinateurs en 2012, et parler de leur travail, me paraît bien plus passionnant, d’autant plus qu’ils sont encore là pour témoigner de leur rôle et de leurs difficultés.

A la fameuse tête en forme de poire de Louis-Philippe, je préfère ce dessin de Cabu tout aussi iconoclaste (ci-dessous, extrait de Sarko Circus – Le cherche midi). Mais on attendra qu’il entre dans l’histoire pour en parler. ff

*Sur James Gillray

Daumier, un espoir du dessin de presse

jeudi 26 janvier 2012

Il y aura bientôt plus de spécialistes du dessin de presse et de manifestations qui le célèbrent que de dessinateurs.

Ainsi on peut s’interroger lorsqu’on apprend (sur le site Caricatures & caricature) la parution d’un numéro de TDC (textes et documents pour la classe) consacré à « Histoire et caricature » (couverture en illustration).

Cette revue éditée par le CNDP-CRDP s’adresse aux enseignants et ce numéro a sans doute pour vocation de faire découvrir ce type de dessins aux jeunes élèves. Mais si la qualité des exemples cités n’est pas à mettre en cause, comment, en valorisant des images dont le contenu n’a plus aucune signification pour les générations d’aujourd’hui, peut-on transmettre aux jeunes l’envie de s’intéresser au dessin satirique ?

Si l’on excepte un entretien avec le dessinateur Riss de Charlie Hebdo, le sommaire de TDC nous propose des articles sur « Napoléon et la caricature », « L’Assiette au beurre », ou l’étude de documents comme la « célèbre » poire de Louis Philippe, ou la caricature sociale par Daumier.

Certes, ces exemples « historiques » constituent l’ADN de ce métier, mais force est de constater qu’à notre époque presque plus aucun journal n’accueillerait leur auteur dans ses pages.

Le ressassement permanent de cette histoire « glorieuse », dans TDC ou ailleurs, masque hélas la situation actuelle du dessin, dit de presse, et de la caricature : de moins en moins de supports qui en publient, des espaces confinés lorsque le journal leur fait une place, des conditions d’expression, de travail et de vie déplorables faites aux auteurs.

Et pourtant il y a à dire sur  tous ceux qui, en 2012, arrivent malgré tout à pratiquer ce métier formidable. Un métier qui allie le moyen d’expression, l’art du dessin, la recherche de la synthèse, l’humour, et surtout la volonté d’amener le lecteur, à s’interroger, à réfléchir, sur le monde qui l’entoure. Pour résumer, à cultiver son intelligence. Rien que pour cela il devrait être enseigné dans les écoles en tant que matière vivante. ff