Fait d'images

le blog de françois forcadell – l'image dessinée dans l'actualité

Archive pour le mot-clef ‘Nicolas Sarkozy’

Sacrée poupée

jeudi 30 octobre 2008

tete-de-noeud-presidentUne poupée vaudou à l’effigie dessinée de Nicolas Sarkozy, président de la République française, vendue en librairie dans un coffret, a déclenché les foudres judiciaires du locataire de l’Élysée. Les magistrats du Tribunal de Paris l’ont débouté en déclarant : “la diffusion de la poupée litigieuse ne caractérise pas une atteinte fautive à son droit à l’image”.

D’après Le Monde (30.10.08) qui relate l’affaire « Les juges estiment au contraire “que la caricature et la satire, même délibérément provocante ou grossière, participent de la liberté d’expression et de communication des pensées et des opinions”.

Si, selon eux, “le droit à l’humour connaît des limites”, ces dernières n’ont pas été dépassées par les éditions K & B, auteurs de l’ouvrage Nicolas Sarkozy, le manuel vaudou, vendu avec la poupée. Les juges considèrent qu’ils n’ont pas “à apprécier le bon ou le mauvais goût du concept proposé”. “Il s’agit d’une œuvre de l’esprit, composé de deux supports indissociables”, qui visent “à brocarder des idées et prises de position politiques, comme des propos et comportements publics, en guise de protestation ludique et d’exutoire humoristique”, soulignent-ils dans leurs attendus. »

Plus jamais ça - Une Charlie Hebdo par GébéÀ noter que Ségolène Royal, qui elle aussi a eu droit à sa poupée, a déclaré à propos du jugement (après avoir été tentée de porter plainte) : “C’est la protection d’une liberté de caricaturer les puissants de ce monde”.

Toujours selon Le Monde, l’avocat du président aurait prononcé cette phrase : “Le droit à l’humour existe en matière de diffamation, mais pas en matière de droit à l’image”. Une affirmation péremptoire que tous les caricaturistes vont sans doute devoir méditer avant de s’exprimer. L’avocat de Nicolas Sarkozy a fait appel.

Illustrations : couvertures du Charlie Hebdo (1974) dessinées par Gébé
et représentant Georges Pompidou et Valéry Giscard d’Estaing,
tous deux présidents de la République. 

(D’autres couvertures de L’hebdo Hara-Kiri, Charlie Hebdo
et du mensuel Hara-Kiri, sur ce site Un vrai régal.)

Charlie hebdo 1 – Mahomet 0.

dimanche 25 mars 2007

Charlie hebdo en procèsUn procès pour rien, celui des organisations musulmans représentatives contre Charlie hebdo, qui avait publié des caricatures jugées offensantes pour cette religion.

En effet, le 22 mars 2007, le tribunal n’a pu que prononcer la relaxe au vu du peu d’arguments que développaient les plaignants. Seule l’Union des organisations islamiques de France a fait appel.

Un verdict attendu mais qui risque de brider encore plus la liberté d’expression des caricaturistes qui sont quand même soumis à la bonne volonté et au courage éditorial de leur directeur de publication et rédacteurs en chef, il ne faut jamais l’oublier.

Aujourd’hui, hélas, la liberté d’expression s’arrête là où commence les intérêts politiques ou économique d’une entreprise de presse, et peu de titres peuvent revendiquer une liberté quasi totale.

Apartés

Ce procès de Charlie a été une bonne affaire pour certains. Libération d’abord, qui, avec son numéro de soutien consacré au procès a vu augmenter ses ventes de 40%. Sans compter que les nombreuses prestations des journalistes de Charlie n’ont pas été rémunérées.

Les ventes de Charlie hebdo, elles, ont quasiment doublées pour le numéro annonçant le procès (115 000 ex), mais sont retombées à 75 000 ex. pour le numéro suivant qui rendait compte du procès.

A noter que tous les autres journaux qui avaient publiés, en soutien à Charlie, les dessins du quotidien danois Jyllands-Posten, n’ont, eux, pas été poursuivis, Le Nouvel Observateur, France Soir et Libération (qui les a republiées le 7 février 2007).

Comme argument de défense, les avocats de Charlie ont montré à l’audience des dessins qui s’attaquaient également au Pape, provoquant alors l’hilarité publique du camp adverse. Un argument qui a fait mouche.

Richard Malka, l’avocat de Charlie hebdo qui défendait dans ce procès la liberté d’expression, accable par ailleurs de poursuites judiciaires le journaliste Denis Robert dans l’affaire Clearstream, firme Luxembourgeoise dont R. Malka est l’avocat en France pour les affaires de presse.

Joli coup médiatique de Nicolas Sarkozy, ministre de l’Intérieur mais aussi candidat à l’élection présidentielle qui, avec une lettre envoyée à Philippe Val et lue à l’audience, a apporté son soutien à Charlie hebdo (“Je préfère un excès de caricature à une absence de caricature”). Il faut préciser que l’avocat des organisations musulmanes, Me Szpiner, est aussi celui de Jacques Chirac, avec qui N. Sarkozy semble vouloir régler quelques comptes.

Johan Sfar qui, dans la foulée, a publié ses croquis d’audience sous le titre «Greffier » (collection Shampoing des éditions Delcourt) a bénéficié d’un publicité à la Une du Figaro et du soutien de Libération. Le gros album réalisé rapidement, trop rapidement, la plupart des textes manuscrits sont illisibles et Philippe Val a des cheveux, rassemble aussi les chroniques que Sfar a publié dans l’hebdo lorsqu’il y collaborait.

Des lettres de menaces arriveraient à Charlie hebdo au nom de Plantu qui ne collabore pas au journal.

En parallèle de cette affaire, Plantu le dessinateur du Monde et de L’Express défend dans les médias la position selon laquelle :

« les dessinateurs doivent continuer a être irrespectueux tout en défendant les croyants ».

Extraits du chat organisé par LeMonde.fr le 22 mars 2007. Dans sa dernière réponse à un internaute, Plantu annonce une initiative le 11 avril 2007 (voir ci-dessous) :

[…]

Question : Jérémie Fontanieu : Ne pensez-vous pas normal, dans le monde au sein duquel nous vivons aujourd’hui, qu’une certaine forme de retenue s’impose à l’égard des communautés qui constituent notre pays ?

Plantu : J’ai toujours pensé que les dessinateurs de presse se devaient d’être impertinents, mais devaient être aussi pertinents dans leur rigueur journalistique. Cela veut dire que depuis que je fais ce travail, au Monde, j’ai toujours trouvé normal de pratiquer l’autocensure. Il est particulièrement démagogique depuis des dizaines d’années de faire croire aux lecteurs qu’un dessinateur a le droit de tout se permettre. En me rendant au procès de Charlie Hebdo le mois passé, une des collaboratrices de Charlie qui témoignait nous disait : “En tant qu’homosexuelle, je suis souvent choquée par les dessins de mes petits camarades de Charlie, qui nous traitent dans leurs dessins de pédés et de gouines. Et d’ailleurs, il n’est pas rare que certains dessins trop outrés soient écartés.” J’appelle ça de l’autocensure, et c’est bien normal.

Il faut en finir avec cette idée que les journalistes libres ne pratiqueraient jamais l’autocensure. Cela m’énerve prodigieusement, et je trouve très démagogique de faire croire à des jeunes qu’on peut tout se permettre. Cela étant, il n’est pas question qu’une seule idée politique ou éditoriale ne soit pas exprimée dans un journal, que ce soit en texte ou en images. Rien ne doit être caché dans les opinions, encore faut-il être malin au moment où on les exprime.

[…]

Juliette D : Allez-vous vous y prendre à deux fois la prochaine fois que vous voudrez dessiner une caricature où figure Mahomet ?

Plantu : Je vous le répète, l’urgence n’est pas de dessiner Mahomet. L’urgence, c’est de réaliser des images dérangeantes sur les religions, et non pas sur les croyants. C’est la raison pour laquelle je fais revenir plusieurs dessinateurs laïques, chrétiens, juifs et musulmans à Paris le 11 avril au ministère de la culture, rue Saint-Honoré, et nous aurons la grande chance de pouvoir débattre sur l’avenir de la caricature. Seront présents Ali Dilem (Algérie), Kichka (Israël), Ranan Lurie (Etats-Unis), Ramize Erer (elle travaille à Istanbul, et ce sera passionnant d’écouter une dessinatrice nous raconter comment, en toute liberté, elle peut faire des dessins rigolos sur les femmes en Turquie et sur l’islam).

Un tour de cochon

mercredi 21 février 2007

vospapiers-couv« Je préfère l’excès de caricature à l’absence de caricature.»

Nicolas Sarkozy, actuel ministre 
de l’Intérieur lors du procès Charlie Hebdo.

Le dessinateur Placid aurait mieux fait de dessiner une caricature de Mahomet plutôt que d’illustrer la couverture d’un livre du Syndicat de la magistrature, dessin pour lequel il vient d’écoper d’une amende de 500 euros.

L’affaire remonte à 2001, et c’est Daniel Vaillant, alors ministre de l’Intérieur, qui avait déposé une double plainte pour diffamation et injure envers la police nationale, ayant cru voir un nez de cochon dans le portrait de policier publié en couverture de Que faire face à la police ? Relaxé une première fois en 2005, Placid et son éditeur (L’esprit frappeur) ont été condamnés lors du procès en appel qui s’est déroulé le 23 novembre 2006. 

Plusieurs initiatives ont été lancées pour soutenir Placid et l’aider à payer son amende.

• Ses confrères se mobilisent et ont lançé un blog de solidarité : Nous sommes tous des cochons ! 

• Un comité de soutien propose de mettre sur ebay des dessins, illustrations, planches originales de collègues dessinateurs et de les vendre au profit du condamné.

Commentaire : dans cette affaire, comme dans celle des caricatures de Mahomet, si les plaignants se reconnaissent dans les dessins c’est donc que les dessins sont ressemblants et il n’y a donc pas diffamation, ni injure, puisqu’ils décrivent la réalité. S’ils ne sont pas comme ça, ils n’ont aucune raison de se reconnaître et de porter plainte. CQFD.