On
est loin des Trois Petits Cochons de notre enfance, là
les porcs sont serrés dans des élevages intensifs
et les éleveurs les toisent, les testent, les jugent.
Ils
se baladent et tombent groin à groin sur des trucs que
les hommes ont laissé traîner, ils jouent à
leurs jeux. Ils se dressent sur leurs pattes de derrière,
comme les hommes et ils peuvent être aussi cons, ils devisent
gravement, ils ont des idées sur tout, ils se font des
civilités, s’offrent des cadeaux, rencontrent d’autres
animaux qu’ils prennent de haut. Les charcutiers les terrorisent.
A leur égard, ils ont le verbe dru, on les sent désenchantés.
La
vie n’est pas toute rose pour le cochon.
On
aime les cochons - dans le cochon tout est bon - de la charcuterie
à la collection de tirelires, on les adore, mais on s’en
méfie, ils sont carnivores et puis il y a la “tuade”
et ça sera un jour de fête, alors on marque la
distance. Dans les fermes du Dauphiné, on ne le nommait
pas, comme le chien, le cheval ou les vaches, on l’appelait
“ l’Autre”. Ici, il s’appelle René,
Maurice ou Howard.