Fait d'images

le blog de françois forcadell – l'image dessinée dans l'actualité

Riri, fifi.

19 décembre 2008 à 12 h 15

Hara Kiri, les belles images

[…] « Le goût pour l’image peut être mis au service de l’esprit critique grâce à la satire et à l’impertinence. À condition de vouloir effectivement fortifier cet esprit critique et non conforter certaines pulsions infantiles, bêtes et méchantes. D’où la division au sein de la presse satirique, entre d’un côté, celle qui veut vivifier la démocratie et, de l’autre, celle qui s’en moque, voire celle qui la vomit. » […]  

Ces quelques lignes de Caroline Fourest publiées dans Le Monde (5.12.2008) ont suscité dans Charlie Hebdo (n°861), une vive réaction de Cavanna qui se sentait visé, et dans le même numéro, une réponse “spontanée” de Caroline Fourest. L’ire de Cavanna, très remonté, a également provoqué quelques réunions (tendues) de la rédaction – dont une exceptionnelle un samedi. Chaque fois Cavanna défend l’esprit du Charlie Hebdo originel qui lui semble très éloigné de ce qu’est devenu l’hebdomadaire.

Extrait : « Pourtant, en cet été 92, quand, dans l’enthousiasme, fut relancé Charlie Hebdo, l’accord était unanime, le propos clair et sans ambiguïté : l’esprit « bête et méchant » renaissait dans toute sa fougue, dans toute sa virulence, et s’interdisait, entre autres, toute complaisance envers quelque faction politique que ce fût.

L’ambition, cette gueuse papelarde, était tapie au cœur même de cette joie. Charlie Hebdo est aujourd’hui ce qu’il est. Sûrement pas un journal « bête et méchant ». Pas encore bon chic bon genre, mais déjà estimé des gens en place. Des gens qui placent.

La racaille rabelaisienne s’en est allée vers d’autres rivages.

Ce que je fous là, moi, dinosaure bouffé aux mites, sur mon tas de décombres ? On me le fera bientôt savoir, je pense. » Fin de citation.

Cavanna raconte CavannaCe nouveau coup de gueule de Cavanna – un premier avait été empêché de parution par une intervention de Wolinski – démontre que les retombées de l’affaire Siné sont loin d’avoir produit leurs effets au sein du journal. Les non-dits persistent et tendent à plomber l’ambiance. Ainsi personne n’oserait évoquer le pactole généré en 2006 par la publication des caricatures de Mahomet, pactole que ce sont partagé en grande partie les trois actionnaires principaux de l’hebdo.

D’autre part, comme il l’a déjà fait à plusieurs reprises Philippe Val tente de ressouder ses troupes en prenant la posture de la citadelle assiégée et dans un éditorial récent n’hésite pas à citer nommément tous ceux qu’il croit être « ces braves dont le seul plaisir semble être de taper sur Charlie Hebdo et Philippe Val » pour reprendre une expression de Caroline Fourest ; Daniel Mermet, Delfeil de Ton, Michel Onfray, Plantu, etc. Des adversaires qu’il amalgame à l’AGRIF association chrétienne qui intente un procès à Charlie et qu’il n’hésite pas à traiter de « vraiment cons », un mot qu’il « utilise rarement » et qu’il emploie « non comme une insulte, mais comme une information ».

À tout ceci il va falloir ajouter la plainte de Ph. Val, Cabu et Wolinski contre les réalisateurs du film Choron dernière (sortie le 7 janvier 2009) au motif que leurs noms figurent sur l’affiche sans leur accord. Sur le site Rue89.com, Pierre Carles, un des réalisateurs avec Éric Martin, commente ainsi cette plainte : “Ce qui est drôle dans cette affaire, c’est qu’il y a dix ans, j’ai pu sortir mon film Pas vu, pas pris, grâce à une souscription lancée par Charlie Hebdo, que dirigeait déjà Philippe Val. Sur l’affiche se trouvait une quinzaine de noms de personnes sans leur autorisation, dont PPDA, Étienne Mougeotte, Patrick de Carolis, ce que cautionnait Charlie Hebdo.”
Ph. Val n’en a pas fini de dénombrer les « cons » qui ne l’aiment pas.

Illustrations : Cultivons le mauvais esprit. Deux ouvrages à offrir à Noël.