Fait d'images

le blog de françois forcadell – l'image dessinée dans l'actualité

Archive pour le mot-clef ‘Siné’

Presse satirique et tirages divers

mardi 13 avril 2010

C’est un Charb, mesuré et prudent, qui réagit en tant que directeur de Charlie Hebdo à l’arrêt de son concurrent direct Siné Hebdo sur le site du journal suisse Le Courrier, relayé par le site Charlie enchaîné. À la question de Roderic Mounir sur l’impact de Siné Hebdo sur les ventes de Charlie, il répond :

«Elles ont chuté brutalement au début, pour se stabiliser autour de 48 000 aujourd’hui, dont 13 000 abonnés et 3 000 ventes à l’étranger. En kiosque en France, nous avons perdu 10 000 lecteurs en deux ans. On se situe à la limite au-dessous de laquelle on ne peut pas descendre. Certaines semaines, il manque deux ou trois mille ventes. On subit une érosion lente qui est commune à toute la presse écrite. Quand Siné dit que son journal n’était pas rentable à 37 000 exemplaires, je ne le crois pas. En limitant les postes fixes et en recourant à des pigistes, c’était jouable – en comparaison, Charlie compte une vingtaine de salariés. Pour moi, il s’agit d’un sabordage : au départ, Siné était parti pour deux ou trois numéros, il voulait nous emmerder et il l’a fait, en reprenant la même maquette, le même format, etc. Depuis, il a dit qu’il en avait marre, à 82 ans. »

Autre analyse à propos de cet arrêt sur le site suisse Le Courrier qui publie sous le titre «Presse satirique : Barrigue qui rit, Siné qui pleure», un article consacré à la presse satirique et donne des nouvelles du jeune hebdomadaire Vigousse. Extrait :

«Il y avait une vraie attente d’un journal satirique en Suisse romande», relève Thierry Barrigue, rédacteur en chef du frétillant Vigousse. Le tabloïd impertinent qu’il a fondé après vingt-neuf ans au Matin en est à son quatorzième numéro depuis le début de l’année. Au niveau des chiffres, le niveau d’équilibre a été plus qu’atteint pour Vigousse. «Il nous fallait entre 3200 et 3500 abonnés pour pouvoir tourner, explique le patron de presse. Nous avons eu la chance de les trouver avant le lancement du journal; plus de 3000 personnes avaient accepté de s’engager sans avoir vu le premier numéro».

Aujourd’hui, le petit satirique romand (comme le proclame son sous-titre) tire à 15 000 exemplaires. Et quelque 3500 numéros sont vendus en kiosque.

«La clé du succès pour un journal, ce sont les abonnés, résume Barrigue. C’est bien ce qui a posé problème à Siné Hebdo. Ils vendaient en kiosques mais n’ont pas réussi à trouver assez de lecteurs sur la durée.»

L’objectif de Vigousse est d’atteindre les 7000 abonnés.

«Avec un tel lectorat, nous serions tout à fait autonomes et pourrions même nous passer de pub, explique le dessinateur. Ce n’est pas un objectif en soi mais cela nous donnerait une marge de manoeuvre par rapport à nos annonceurs, en nous mettant à l’abri de toute pression.»

Siné for ever

lundi 12 avril 2010

L’hebdomadaire satirique Bakchich Hebdo publie à propos de Siné (qui arrête Siné Hebdo le 28 avril 2010), les témoignages des dessinateurs Large, Gab, Lindingre, Decressac, et celui de Chimulus :

« Mon père (Jacques Faizant) :
– Chérie, hier soir j’étais au Pop Club de José Artur, il y avait Topor et il n’a pas voulu me serrer la main !
Ma mère :
– Quelle peau de vache, pire que Bedos, pourtant tu dessines mieux que lui ! Et Siné, il était là ?
Mon père :
– Non, tu vois bien que j’ai encore toutes mes dents !
Je suis sorti de table tout chamboulé d’admiration. Il aurait été capable de casser la gueule de mon père ? Un homme qui déjeunait avec De Gaulle, Pompidou, Giscard ? « Quand je serai plus grand, je rencontrerai Siné, je me suis dit ! C’est fait ! Et je ne le regrette pas ! »

Chimulus dessine aujourd’hui pour Siné Hebdo, et les sites internet de 20 minutes, Rue 89, entre autres collaborations.

Tous les textes dans le n°19 de Bakchich Hebdo du 10-16 avril 2010.

Illustration : Chimulus vu par Chimulus.

La fin de Siné Hebdo

mercredi 31 mars 2010

Le site Rue89.com a interviewé Siné sur l’arrêt de Siné Hebdo (voir aussi le blog Siné Hebdo) mais donne également la parole à Charb, directeur de Charlie Hebdo. Extrait de l’article d’Augustin Scalbert : « Le patron de Charlie Hebdo, Charb, est un peu sonné par cette nouvelle. Chez eux, « c’est pas le super pied, mais on survit quand même ». Le principal concurrent de Siné Hebdo vend à 48 000 exemplaires, sa « ligne de flottaison », selon Charb ».

« Mais il ne faut surtout pas qu’on descende en dessous. » Le directeur de Charlie raconte qu’à la parution de Siné Hebdo, son journal « a descendu un pallier » : « Avant, on était autour de 53 000 exemplaires. Puis plus rien, et ensuite tout le monde a descendu. Sauf Le Canard, qui continue de vendre 500 000 journaux chaque semaine. ».

Selon Charb, cette désaffection des lecteurs est clairement due à la crise économique : « Avant, les hebdos satiriques n’étaient pas touchés par la crise de la presse. Aujourd’hui, notre lectorat, qui est peu fortuné, calcule à l’euro près. Le manque de fric des gens, c’est une chose incroyable. ».

Charb n’attend pas un report des ventes de Siné Hebdo vers Charlie, puisque « la plupart de nos lecteurs lisaient les deux journaux ». D’après lui, Siné, « parti initialement pour deux numéros, en pied de nez à Philippe Val », a ensuite fait un journal « un peu trop proche de Charlie » ,« Ça nous a placés en concurrents, alors qu’on n’aurait pas dû l’être. »

Illustrations : les Unes de cette semaine
de Siné Hebdo et de Charlie Hebdo.

L’arrêt de Siné Hebdo

lundi 29 mars 2010

Il y a des poissons d’avril plus drôles. Dans son n°82, le journal Siné Hebdo annonce sa disparition fin avril, le dernier numéro paraîtra le 28 avril 2010.

Ainsi se termine une réussite éditoriale totalement atypique née en 2008 du licenciement de Siné par Charlie Hebdo et son directeur de l’époque, Philippe Val.

Plus de 16 mois après son apparition surprise, Siné Hebdo est confronté à une baisse générale des ventes de journaux, et son chiffre de vente actuel, honorable mais insuffisant, 33 000 ex., auxquels il faut rajouter environ 4 000 abonnés, ne lui permet pas de continuer à exister sereinement. D’où la décision de Siné, et de Catherine Sinet, fondateurs du titre, de terminer en beauté plutôt que de voir la situation se dégrader encore faute d’acheteurs.

La nouvelle de l’arrêt de Siné Hebdo a été annoncée dès dimanche 28 mars sur les blogs des dessinateurs Lindingre et Berth, avant d’être retirée. C’est finalement le NouvelObs.com qui sera le premier à annoncer « officiellement » la nouvelle :

« Le plus dur a été de prendre la décision, commente Catherine Sinet, rédactrice en chef, la femme de Bob Sinet alias Siné. On a tenu bon tant qu’on a pu, en faisant un journal qu’on aimait et qui nous paraissait digne et drôle. On préfère fermer dignement, comme on a commencé. La sentence est tombée jeudi soir. Pour Siné et son équipe, il s’agit de prévenir une faillite qui aurait été inéluctable, et de s’épargner ainsi l’humiliation du bal des redresseurs judiciaires et autres mandataires de justice.»

Ce blog reviendra plus tard sur l’histoire de Siné Hebdo et sur les difficultés de la nouvelle presse satirique en France, avec Bakchich, qui malgré un apport massif de capitaux n’arrive pas à décoller, et Charlie Hebdo qui doit faire face, lui aussi, à une cruelle désaffection des lecteurs.

Flavien Moreau

lundi 29 mars 2010

La première « Bourse du jeune talent du dessin de presse » attribuée par la BnF dans le cadre de la Biennale du dessin de presse a été décernée le 27 mars au jeune dessinateur Flavien Moreau.

Le prix est doté d’un chèque de 2000 euros.

On peut voir les dessins de Flavien dans Siné Hebdo, où Siné lui a donné sa première chance, le bimestriel Kamikaze, dont le n°2 est actuellement en kiosque, et sur son site personnel.

En illustration, le dessin primé (cliquer sur l’image pour l’agrandir).

À noter que la dessinatrice Coco (Vigousse, Psikopat, Charlie Hebdo, Rue 89, et blog) arrivait en seconde place dans le classement du jury.

Paroles imagées

mercredi 24 mars 2010

Le dessinateur Siné a accordé un très long entretien à la revue Médias (n°24 – printemps 2010). Sur onze pages, interrogé par Emmanuelle Duverger et Robert Ménard, il évoque sa vie, son métier, et reviens sur la création de Siné Hebdo.

Dans ce même numéro, sous le titre « MédiaMorphoses », on peut aussi lire plusieurs articles rédigés par des universitaires sur la caricature et le dessin de presse. Thèmes abordés : « Rire des autres et rire de soi » (Hélène Duccini), « Les handicapés dans la caricature » (Hélène Duccini), «  Caricatures de Mahomet le miroir aux alouettes iranien » (Christian Delporte), « L’image réciproque du Français et de l’Anglais dans les caricatures des deux pays » (Pascal Dupuy),
« L’Allemagne et la France dans la caricature du voisin » (Jean-Claude Gardes), « L’Auvergnat et le Passif central » (Christian Moncelet), et enfin « Ich bin ein Berliner,  Plantu au pied du… mur » (Maryline Crivello).

Médias publie des dessins de Cambon, Glez, Lagautrière, mais a abandonné le principe des couvertures dessinées par Séverin Millet à partir de son n°23.

À signaler également une chronique de Claude Moisy en page 44 qui, sous le titre « Et si la bombe de Mahomet était un boomerang ? » s’interroge sur l’opportunité « dans un tel contexte de tourner en dérision un Prophète dont l’image n’est pas seulement sacrée pour les phalanges excitées du djihad mais pour des centaines de millions musulmans paisibles dans le monde ? »


Illustrations : la couverture de Médias et une capture d’écran du site de la revue.