Fait d'images

le blog de françois forcadell – l'image dessinée dans l'actualité

Archive pour la catégorie ‘Actu Média’

Dessiner à l’œil ?

mardi 22 octobre 2013

Le 10 octobre Libération consacrait un article aux graphistes qui s’insurgent contre le système « délétère » de la commande publique nationale, régionale et institutionnelle en France « qui rend un travail graphique de qualité presque impossible » (sujet déjà abordé sur ce blog).

Dénonçant des budgets insuffisants, des choix arbitraires et l’incompétence des commanditaires, ils tentent de sensibiliser le ministère de la Culture à leur sort de créateurs.

Une situation qui n’est pas loin de ressembler à celle que connaît le dessin dans la presse, dont le critère de publication est de plus en plus le tarif le plus bas accepté par le dessinateur.

C’est la crise, non seulement économique mais aussi culturelle. Allez convaincre que le sens des images et le plaisir des yeux, sont tout aussi importants que la recherche d’un emploi. Pour éviter tout débat abyssal, disons complémentaires.

Selon Libération : « Une Fête du graphisme se profile pour début 2014. Michel Bouvet, créateur des affiches des rencontres d’Arles et porteur du Mois du graphisme d’Echirolles, en sera le commissaire et «rassemblera près de 200 graphistes de France et du monde entier ».

Extrait du texte « Partager le regard » mis en ligne par Vincent Perrottet, affichiste. Plus de 3 000 signataires soutiennent ce texte.

[…] Il est stupéfiant que ces millions de messages visuels imposés à nos yeux et à notre intelligence ne suscitent aucun commentaire, aucune critique cultivée, comme s’ils n’existaient pas, comme si cela ne nous concernait en rien. Le regard que nous portons individuellement et collectivement sur cette production visuelle colossale n’intéresserait-il personne ?

Pourtant les enjeux liés à la production de sens par l’image sont gigantesques et concernent le monde dans son ensemble.

La représentation des personnes, des objets, des espaces et de la relation des uns entre les autres, l’expression des sentiments humains, du plaisir, de la souffrance et de l’indifférence, de l’organisation politique et économique des sociétés, donnent normalement à ceux qui en ont la charge, une responsabilité qui ne peut pas se situer hors des débats, ni fonctionner dans une opacité rendant possibles tous les abus.

Dans un monde se donnant à comprendre en grande partie par l’exercice du regard, ceux qui décident des images prennent un pouvoir qui devient totalitaire s’il n’est pas questionné démocratiquement. […]

En illustration, l’affiche qui a énervé à juste raison les graphistes (voir article de Libération).

Le dessin de presse honoré en Belgique

mercredi 9 octobre 2013

A voir, la vidéo du discours de la dessinatrice tunisienne Nadia Khiari plus connue sous la signature de Willis from Tunis (Siné mensuel) lors de la Rentrée Académique de l’Université de Liège le 25 septembre 2013 où elle a reçu le titre de Docteur Honoris Causa (Photo).

A voir également la vidéo de l’intronisation le même jour au titre de Docteur Honoris Causa du dessinateur Plantu (Le Monde) et de son confrère belge Kroll (RTBF).

Troisième video, le discours de Bernard Rentier, recteur de l’Université de Liège, prononcé sur le thème de la liberté d’expression : “Transgresser les tabous”.

Le Monde soutient Plantu

mardi 8 octobre 2013

Après la polémique déclenchée par la publication d’un dessin de Plantu mettant en cause la CGT, le journal Le Monde prend fait et cause pour son dessinateur. Dans un article “Les intouchables” consacré à cette affaire, le médiateur du journal, Pascal Galinier, cite les témoignages de soutien :

Nathalie Nougarède, directrice du Monde : “Un dessin peut peut-être choquer, heuter, des sensibilités. Mais sa publication relève d’un principe que nous entendons défendre avec vigueur : l’indépendance éditoriale absolue, cela passe aussi par l’humour. Il est important que Le Monde offre à ses lecteurs la liberté de ton et l’indépendance d’esprit qui sont les caractéristiques et les valeurs du dessinateur de presse.”

Xavier Gorce, dessinateur des Indégivrables : “Quand on fait râler les cons, c’est que le dessin est bon”.

Matthieu Tracol, lecteur, enseignant-chercheur à la Sorbonne et à l’université d’Artois (Nord – Pas-de-Calais) : Une démocratie digne de ce nom ne doit pas se soucier du talent du caricaturiste, et doit même se glorifier de laisser publier des caricatures bêtes et méchantes. Elle doit se féliciter de voir publier des dessins étant une insulte à la fois à l’intelligence et à l’humour, car c’est précisément là la condition pour que d’autres dessins puissent atteindre à l’idéal, à la drôlerie, à la finesse, et finalement toucher  juste”.

Plantu également cité déclare : “Quelle chance de pouvoir s’exprimer dans une caricature chaque jour à la “une” du Monde, et quel privilège d’être protégé par des rédacteurs en chef qui donnent leur feu vert au dessin choisi. Le dessin est un excellent moyen pour animer les débats et les opinions.”, “Le dessin fait dire des choses qu’on n’aurait pas dites sans avoir vu l’image, et c’est parfait pour le débat”

En illustration, un dessin plus ancien de Plantu sur la CGT, le contentieux n’est pas nouveau.

Plantu contre la CGT / Charb contre Plantu

vendredi 4 octobre 2013

La polémique sur le dessin de Plantu assimilant la CGT à des intégristes religieux prend de l’ampleur. Sur Europe 1, le vendredi 4 octobre Plantu a déclaré  “Le boulot du dessinateur est de faire parler ! Il n’y a rien de pire qu’un dessin qui ne fait réagir ! J’ai été gâté à ce niveau-là ! On se rend bien compte que je défendais les gens qui veulent travailler le dimanche et ils ont bien le droit, sinon les hôtesses de l’air ou les ouvreuses de théâtre peuvent rester à la maison…”, et  “Le fait de voir toute la polémique autour… C’est une autre fatwa ! C’est la fatwa de la CGT ! Il faut savoir que tous les dessinateurs de presse depuis 1945 n’ont jamais le droit de critiquer le syndicat du Livre-CGT. Les dessinateurs danois n’ont pas le droit de dessiner Mahomet, les dessinateurs français n’ont pas le droit de critiquer la CGT !”

De son côté, le dessinateur Charb a publié dans L’Humanité (illustration ci-contre – cliquez sur le dessin pour agrandir) un dessin où l’on voit Plantu affublé d’un uniforme brûler le code du travail.

Sur cette “affaire” à lire et à voir également “Plantu meilleur ennemi de la gauche ?” sur le site Agoravox.tv

A suivre (sûrement)…

(Merci à Cambon et à ses lectures).

Haro sur le dessin de presse (3856 ème épisode)

jeudi 3 octobre 2013

Décidément le périmètre éditorial du dessin de presse se réduit de jour en jour. Faut-il rappeler que si la caricature ne peut pas exprimer en toute liberté créative, une idée, un point de vue, avec ou sans humour parfois, elle devient incolore et sans saveur.

Actuellement ce sont deux dessins, un de Plantu sur la CGT et un de Wolinski sur la retraite à 60 ans qui créent la polémique.

Les démêlés de Plantu avec la CGT ne sont pas nouveaux mais le dessin publié à la Une du Monde (ci-contre) n’a pas vraiment plu au syndicat dont le secrétaire général Thierry Lepaon a déclaré « Que la posture de la CGT soit remise en cause, moquée, voire ridiculisée ne nous a jamais choqué, c’est la règle du jeu de la presse dans une société démocratique. Le miroir que celle-ci nous renvoie parfois peut même s’avérer salutaire. Nous le prenons comme un élément du débat, de la confrontation des idées, des points de vue et des convictions », « Mais le parallèle que fait le dessin de Plantu entre la CGT et la face la plus violente d’un extrémisme politique liberticide ne relève pas de ce registre- là », « Il est non seulement indécent mais également antirépublicain. Il nous déshonore tous. » (source L’Express).

Les commentaires de la presse : Le Nouvel Observateur, L’Humanité (qui reproduit le dessin), Médiapart.

Pour Wolinski c’est un dessin choisi par le Parti Communiste Français et le Front de Gauche en illustration d’une campagne pour la retraite à 60 ans qui est qualifié de « sexiste » par les internautes (dixit Le Figaro qui relate l’affaire).

A lire aussi sur le sujet l’article du site Arrêt sur Images.

A noter que l’original de ce dessin est actuellement exposé à la Galerie Glénat à Paris.

Un bon dessin (qui vaut toujours mieux qu’un trop long discours), s’adresse à l’intelligence du lecteur. Il peut aimer ou détester, mais il peut aussi essayer de comprendre ce qu’a voulu dire le dessinateur et en débattre. D’ailleurs Thierry Lepaon le dit lui-même « l’objectif et le ressort du dessin de presse sont de susciter la réflexion et la réaction du lecteur sur un registre décalé de l’argumentation ou du raisonnement ». Peut-être faudrait-il rajouter en toute indépendance.

Cavanna et Denis Robert

mercredi 25 septembre 2013

L’hebdomadaire Paris Match consacre un article à Denis Robert qui prépare actuellement  un film sur Cavanna intitulé “Jusqu’à l’ultime seconde, j’écrirai“.

Extraits de l’interview :

[…] Qu’est-ce qui vous a incité à réaliser un portrait de Cavanna ?
J’ai réalisé lors d’une intervention devant une salle d’étudiants documentaristes âgés de 25 à 30 ans et issus d’un milieu socio-culturel plutôt favorisé, que seul cinq d’entre eux connaissaient Cavanna ! Il y a eu un film sur le professeur Choron, un autre sur Siné et, à mes yeux, Cavanna, est au moins aussi important par ses qualités d’écrivain et son combat pour la liberté d’expression. S’il n’y a avait pas eu Cavanna, il n’y aurait pas eu Groland, Charlie Hebdo, Didier Porte, Stéphane Guillon… Quant à ses livres, «Les Ritals » ou « Les Russkoffs», ils ont été vendus à des millions d’exemplaires. Pourtant, les gens l’ont oublié. Certains croient qu’il est mort, d’autres le confondent avec Anthony Kavanagh ! […]

[…] L’influence de Cavanna est considérable mais a-t-il un héritier direct, quelqu’un qui aurait repris son flambeau ?
C’est difficile à dire. Il est tellement multicartes… Ecrivain, auteur d’une centaine de bouquins, éditorialiste… Il a surtout offert des espaces de liberté incroyables à toute une génération de dessinateurs et d’auteurs comme Jackie Berroyer, Gébé, Pétillon et tant d’autres… Sans lui, un pan entier de l’humour de notre pays n’existerait pas. Mais il n’est pas « Papa poule », il ne couve pas les gens. Il les jette dans le grand bain. […]

Illustration : Cavanna vu par Honoré.