Fait d'images

le blog de françois forcadell – l'image dessinée dans l'actualité

Archive pour le mot-clef ‘Charlie Hebdo’

Luz, le dessin et Charlie Hebdo

lundi 5 novembre 2018

 

Maintes fois je l’ai écrit, la création, la vie d’un journal est une aventure extraordinaire. Sa conception, la constitution d’une équipe, la rencontre avec le lecteur. Une aventure collective, mais aussi personnelle. Celle de Luz est racontée dans Les indélébiles (excellent titre) paru aux fidèles éditions Futuropolis. 23 ans passés au sein de la rédaction de Charlie Hebdo, titre mythique ressuscité en 1992. Son arrivée à Paris, sa rencontre à 20 ans avec Cabu, ses potes, Charb, Tignous, Riss, Catherine Meurisse, Honoré, d’autres, et toujours l’omniprésent Gébé en filigrane.

Des souvenirs heureux, amusés, d’un temps où « on a fait un journal marrant », et au sein duquel il a appris son métier entouré de ses « références : Gébé, Cabu, Willem, Wolinski ». Un idéal brutalement interrompu par le massacre d’une partie de la rédaction le 7 anvier 2015.

« Luz raconte Charlie » titre l’hebdomadaire qui dans son numéro 1371 lui consacre un supplément promotionnel de 16 pages. A la vérité Luz raconte « son » Charlie, celui des moments qui ont imprimé sa mémoire. Pas tous. Luz à choisi de ne pas attiser l’évocation des conflits internes qui ont émaillé cette période, exit le départ de Lefred-Thouron, suite à l’affaire Font, rien sur la dévastatrice affaire Siné, encore moins sur le patron carriériste Philippe Val et les dommages qu’il a infligé au titre. Luz n’a semble-t-il pas voulu abimer ses souvenirs, il le reconnaît « Je ne parle pas des engueulades, parce que ça a été suffisamment abordé dans d’autres bouquins ». A noter que l’ancien directeur est totalement absent du bouleversant dernier chapitre.

Eloigné de la presse mais pas du dessin, sujet essentiel de cet album (l’épisode de l’iPad de Tignous est hilarant), Luz, Renald Luzier, a besoin de se reconstruire, moralement, psychologiquement, lui qui a échappé fortuitement à une mort terrible. Après Catharsis, ce livre est une avancée supplémentaire. Ce sera sans doute encore long, mais si chaque étape nous offre un livre aussi fort que Les indélébiles il est sur le bon chemin. f.f.

Une petite histoire de La Grosse Bertha

Beaucoup de ceux qui me fréquentent depuis longtemps savent que je n’ai pas l’habitude de me mettre en avant dans ce que j’entreprends avec les dessinateurs. Mais il y a une chose que je ne laisserai pas dire, et encore moins laisser croire, c’est que Philippe Val a eu une quelconque part dans la création en 1991 de l’hebdomadaire La Grosse Bertha. Ce projet de journal satirique je le portais depuis plusieurs années et il a pris forme avec l’appui de Cabu et de l’éditeur Jean-Cyrille Godefroy.

Nos moyens étaient dérisoires, des photocopies pour la photogravure, mon ordinateur personnel, un Mac Plus, pour les textes, mon fax pour recevoir les dessins, et pendant plusieurs semaines, outre ma fonction de rédacteur en chef, j’ai fait office de secrétaire de rédaction, et j’ai composé moi-même tous les titres des 12 pages à l’aide de lettres transfert. Avant l’envoi du n°1 chez l’imprimeur j’ai passé une longue nuit blanche seul à relire les textes, maquetter les dessins, faire les corrections. J’étais déjà depuis plus de 24 heures dans cette cave de la rue Quincampoix qui faisait office de bureaux. Seul, à m’assurer que le journal était tel qu’il devait paraître.

Je rêvais de faire un journal de dessinateurs et il était là. J’en ai choisi la mise en page, le papier, et l’équipe de dessinateurs. Il suffit de feuilleter les premiers numéros pour voir que tous ceux que j’avais contactés avaient répondu présent, Cabu bien sûr, mais aussi Gébé, Willem, Siné, Nicoulaud, Cardon, Wolinski, Kerleroux, Vuillemin, Loup, et même Bernar, Honoré, Lefred-Thouron, Tignous, Berth, Kafka, Plantu, Pessin, Faujour et Charb aussi. J’avais même demandé que les dessinateurs mensualisés soient mieux payés que les rédacteurs. C’est dire l’importance que je leur accordais.

Pendant les trois premiers mois où j’ai été à la tête du journal il m’est souvent arrivé de privilégier des dessins en grand format plutôt que des articles pas drôles. Parmi ceux-là il y avait bien évidemment ceux de Philippe Val (arrivé là dans la besace de Cabu) – la guerre c’est mal -, que je coupais de moitié ou qui se perdait opportunément dans les entrailles de l’unique ordinateur. Très vite La Grosse Bertha – dont le n°1 ne devait être qu’un one shot pour tester notre capacité à faire un journal – a rassemblé suffisamment de lecteurs pour continuer à paraître.

Un succès qui a du donner à Philippe Val l’idée de le diriger. Il a d’ailleurs très vite tenté de le faire, mutique ou absent des comités de rédaction, il contactait dans mon dos les membres de l’équipe, flattant les uns, encourageant les autres (qui me le racontaient). Jusqu’au jour où sans doute lassé de voir ses textes brillants, ne pas faire office d’éditorial, ou relégués au fond du journal, il a convaincu son indéfectible ami Cabu que l’hebdomadaire se devait d’avoir deux rédacteurs en chef. Dont un dédié aux textes, devinez qui était pressenti ? Une tentative de putsch assez désagréable, le journal continuait à bien se vendre, une situation intenable pour moi qui m’a valu (après, je l’avoue aujourd’hui, une remarque insolente de ma part) une colère mémorable – dixit Gébé – du gentil Cabu.

J’ai alors donné ma démission et je suis parti – épuisé par trois mois sous pression –mais laissant un journal en état de marche et dont tous les collaborateurs étaient payés. Il m’était impossible de continuer sans avoir la confiance de Cabu – mon idole depuis l’âge de 15 ans – sachant de surcroit qu’il soutenait hélas l’ambition démesurée de Val. Cet arrivisme sera contrecarré par le reste de l’équipe, Henri Montant (Arthur) en tête, qui pendant plusieurs mois l’empêchera d’accéder aux commandes. Lorsqu’il les obtiendra enfin, les ventes de La Grosse Bertha dégringoleront et Jean-Cyrille Godefroy cherchera à reprendre la main sur son journal. La suite on la connaît avec la reparution de Charlie Hebdo.

Voilà, c’est juste une mise au point, Philippe Val a toujours fait carrière en manipulant, en trompant, en volant, en trahissant, tous ceux qui ont servi sa carrière, autant il a réussi à faire revivre Charlie Hebdo et à piller ses caisses, autant une chose est incontestable, il n’est pour rien, vraiment rien, dans la création de La Grosse Bertha et je tenais à l’écrire.

Les dessins ci-dessous qui illustrent ce texte sont extraits de Indélébiles le dernier livre de Luz paru chez Futuropolis.

La mort de René Pétillon 1945-2018

dimanche 30 septembre 2018

Dessinateur de BD à succès (L’enquête Corse, entre autres albums), il a aussi été le scénariste du Baron noir, série dessinée par Yves Got et parue dans le quotidien Le Matin de Paris de 1976 à 1981. Pétillon était entré au Canard enchaîné en 1993 en même temps que Lefred-Thouron. Il avait quitté le journal à l’été 2017 officiellement pour cause de retraite mais surtout en raison d’un cancer qui l’a emporté. En novembre 2018 le festival BD Boom à Blois devait lui rendre hommage, ainsi qu’à son œuvre. Pétillon avait publié ses premiers dessins en 1968 dans L’enragé de Siné, en 2015 il avait apporté son soutien à Charlie Hebdo en dessinant pour l’hebdomadaire.

Son dernier livre de dessin de presse est “Un certain climat – 10 ans d’actu dans “Le Canard enchaîné” ” paru en 2017 aux éditions Dargaud.

Choron revient (en librairie)

mercredi 26 septembre 2018

La vie du Professeur Choron paraît totalement invraisemblable. Pourtant tout est vrai dans “Vous me croirez si vous voulez” (éditions Wombat), de son enfance à son passage à l’armée et en Indochine, jusqu’à la folle aventure de la création d’Hara-Kiri mensuel, des éditions du Square, et de Charlie Hebdo terminée en 1981. Georget Bernier raconte tout, dans les détails, y compris comment il a sauvé Hara-Kiri en devenant le gigolo d’une milliardaire de 75 ans. Aimé, détesté, incompris, mais bourré de talents multiples, Choron a été un « un artificier fou de haut vol. Intransigeant. Noble. Céleste » comme l’écrit Jean-Marie Gourio co-auteur de ce récit.
Ce livre est la réédition de “Vous me croirez si vous voulez ” paru en 1993 (Flammarion). Cette nouvelle édition comporte de nombreuses photos et le récapitulatif des journaux, revues, livres que le Professeur Choron/Georget Bernier a contribué à faire paraître, de Zéro à La Mouise, en passant par Surprise, ou Grodada. Entre autres.

Dessin de couverture Kiki Picasso d’après une photo d’Arnaud Baumann.

Le meilleur de Willem

mardi 5 juin 2018

Vient de paraître “Macron l’amour fou” aux éditions Les Requins Marteaux.

A paraître fin 2018, “Le bon, le vrai, le beau”, 50 ans de revues de presse publiées dans De Nieuwe Linie, Ix, Hara-Kiri Hebdo, Charlie Hebdo, Charlie mensuel, Zéro, Libération, Charlie Hebdo 2. Un demi-siècle de créations graphiques dénichées et répertoriées par Willem. Actuellement en souscription chez l’éditeur Jean-Pierre Faur, voir document ci-dessous (cliquer dessus).

En photo (Philippe Lagautrière) : Willem parmi les trésors de la librairie de Jean-Pierre Faur, Un Regard Moderne, 10 rue Gît-le-Cœur 75006 Paris.

 

 

 

Que peut la satire ?

mercredi 23 mai 2018

Depuis le massacre du 7 janvier 2015 à Charlie Hebdo on ne s’est jamais autant intéressé à la caricature et au dessin de presse, même si on constate à regret qu’il n’y a pas plus de place pour ce moyen d’expression dans les médias. Avec l’album de BD « Le pouvoir de la satire » (Dargaud) ce sont deux dessinateurs qui s’y collent, Fabrice Erre et Terreur Graphique (Georges Boissier).

Historique (deux siècles), liberté d’expression, censure, presse (« racine de la démocratie »), analyse de la satire, tout les thèmes y sont passés en revue et on peut juste regretter que ne soit pas abordé le statut économique et social des dessinateurs. C’est dense (pré-publié en chapitres dans l’excellente Revue dessinée), illustré par pas mal d’anecdotes, on y cite beaucoup Charlie Hebdo, et surtout les auteurs se posent beaucoup de questions sur ce qui est encore aujourd’hui un métier. L’album se termine par ces constats « la satire prend de nouvelles formes, surgit à d’autres endroits : elle est toujours là ! », et « Ce n’est pas sûr qu’elle puisse sauver le monde, mais au moins le rendre plus libre (Et plus drôle !)». Drôle, c’est une des qualités de l’album à défaut de nous convaincre totalement que la satire (et son « esprit frondeur ») a un réel pouvoir.

Dessins et dessinateurs

mercredi 21 mars 2018

Des informations glanées de ci-de-là :

Exposition de dessins de Wolinski au Palais de Tokyo à Paris, du 13 avril au 13 mai 2018.

Charlie Hebdo préparerait une nouvelle maquette pour relancer ses ventes qui sont au plus bas. Celle-ci serait confiée à Jean Bayle déjà auteur d’une nouvelle mise en pages en 1993.

Le prochain numéro de Zélium (n°10) revient dans les kiosques à journaux le 3 avril après un an d’absence. Le dessin de couverture est signé LB qui a également signé ces derniers mois des couvertures de Siné mensuel.

Eric Salch (Fluide Glacial) dessine désormais pour Charlie Hebdo. Il se dit aussi que la signature Zorro cacherait celle de François Boucq, en tout cas ça y ressemble. Celui-ci avait déjà dessiné dans l’hebdo en 2015 pour soutenir sa reparution. Autre (nouvelle) signature celle de Biche (Adrien Bernardet).

Le prochain album de Catherine Meurisse sera publié en septembre 2018 aux éditions Dargaud.

Selon un membre éminent de l’Eiris, Bernard Bouton ne sera peut-être pas présent à la BnF le 22 mars pour la Journée d’étude sur le dessin de presse et c’est bien dommage.

La librairie Un Regard Moderne va présenter prochainement une réédition du mythique Album Primo-Avrilesque d’Alphonse Allais paru en 1897. Illustration ci-dessous Gallica.