Fait d'images

le blog de françois forcadell – l'image dessinée dans l'actualité

Archive pour le mot-clef ‘Kerleroux’

Les 30 ans de la création de La Grosse Bertha

dimanche 17 janvier 2021
C’était un 17 janvier, il y a tout juste 30 ans. Grâce à Cabu et l’éditeur Jean-Cyrille Godefroy, je réalisais un rêve de gamin, créer un journal satirique.
Encore merci aux dessinateurs qui m’ont suivi dans les débuts de cette drôle d’aventure : Cabu, Willem, Gébé, Lefred-Thouron, Cardon, Siné, Loup, Konk, Bernar, Honoré, Kafka, Vuillemin, Nicoulaud, Kerleroux, Plantu, Chenez, Pessin, Wolinski, Tignous, Faujour, Charb, Soulas. D’autres arriveront par la suite, je raconterai tout ça bientôt, dans le détail.

Le Canard enchaîné va former ses dessinateurs

lundi 1 avril 2019

Avec les disparitions des dessinateurs Cabu et Pétillon, l’hebdomadaire satirique a perdu ses dernières années deux de ses plus grands pourvoyeurs de dessins. Or depuis le journal a du mal à recruter de nouvelles signatures. Si Lefred-Thouron, Mougey, Wozniak, Escaro, forment le dernier carré d’anciens, le Canard continue à faire appel aux vétérans Delambre, Potus, Kerleroux, Pancho, Ghertman, ou même Kiro, dont certains sont en principe à la retraite. La présence des nouveaux est quelquefois aléatoire, Aranega, Aurel, Bouzard, depuis peu, Dutreix, Lindingre, et Urbs, Sans oublier les deux dessinatrices, Adelinaa et Vera Makina qui elle illustre régulièrement la chronique Plouf ! de Jean-luc Porquet.

Cette multiplicité de signatures dénote les difficultés à constituer une équipe régulière. On voit bien que la rédaction tâtonne encore avec l’arrivée récente et inopinée de Chappatte,.

D’où l’idée de la création d’un atelier formation au sein du journal où les dessinateurs (y compris de jeunes débutants) pourraient échanger avec les rédacteurs des idées, ces derniers pouvant également orienter le style graphique pour obtenir le résultat souhaité, ce qui, il faut le dire, est déjà parfois le cas. Ainsi Lindingre a du abandonner ses nez de personnages en forme de groin qui faisaient l’originalité de ses caricatures, mais il n’est pas le seul a avoir bénéficié de conseils avisés de la rédaction.

Les surtitres, autre tradition de l’hebdomadaire feraient aussi l’objet d’un travail en commun. Il faut aussi savoir qu’au Canard ce sont les rédacteurs qui sélectionnent les dessins à paraître. Situé au dernier étage du journal cet atelier de formation rentrerait en activité au tout début avril 2019. Le 1er avril pour être précis.

Dessin de Pétillon et inédit de Cardon en retrait du Canard depuis quelques années.

Luz, le dessin et Charlie Hebdo

lundi 5 novembre 2018

 

Maintes fois je l’ai écrit, la création, la vie d’un journal est une aventure extraordinaire. Sa conception, la constitution d’une équipe, la rencontre avec le lecteur. Une aventure collective, mais aussi personnelle. Celle de Luz est racontée dans Les indélébiles (excellent titre) paru aux fidèles éditions Futuropolis. 23 ans passés au sein de la rédaction de Charlie Hebdo, titre mythique ressuscité en 1992. Son arrivée à Paris, sa rencontre à 20 ans avec Cabu, ses potes, Charb, Tignous, Riss, Catherine Meurisse, Honoré, d’autres, et toujours l’omniprésent Gébé en filigrane.

Des souvenirs heureux, amusés, d’un temps où « on a fait un journal marrant », et au sein duquel il a appris son métier entouré de ses « références : Gébé, Cabu, Willem, Wolinski ». Un idéal brutalement interrompu par le massacre d’une partie de la rédaction le 7 anvier 2015.

« Luz raconte Charlie » titre l’hebdomadaire qui dans son numéro 1371 lui consacre un supplément promotionnel de 16 pages. A la vérité Luz raconte « son » Charlie, celui des moments qui ont imprimé sa mémoire. Pas tous. Luz à choisi de ne pas attiser l’évocation des conflits internes qui ont émaillé cette période, exit le départ de Lefred-Thouron, suite à l’affaire Font, rien sur la dévastatrice affaire Siné, encore moins sur le patron carriériste Philippe Val et les dommages qu’il a infligé au titre. Luz n’a semble-t-il pas voulu abimer ses souvenirs, il le reconnaît « Je ne parle pas des engueulades, parce que ça a été suffisamment abordé dans d’autres bouquins ». A noter que l’ancien directeur est totalement absent du bouleversant dernier chapitre.

Eloigné de la presse mais pas du dessin, sujet essentiel de cet album (l’épisode de l’iPad de Tignous est hilarant), Luz, Renald Luzier, a besoin de se reconstruire, moralement, psychologiquement, lui qui a échappé fortuitement à une mort terrible. Après Catharsis, ce livre est une avancée supplémentaire. Ce sera sans doute encore long, mais si chaque étape nous offre un livre aussi fort que Les indélébiles il est sur le bon chemin. f.f.

Une petite histoire de La Grosse Bertha

Beaucoup de ceux qui me fréquentent depuis longtemps savent que je n’ai pas l’habitude de me mettre en avant dans ce que j’entreprends avec les dessinateurs. Mais il y a une chose que je ne laisserai pas dire, et encore moins laisser croire, c’est que Philippe Val a eu une quelconque part dans la création en 1991 de l’hebdomadaire La Grosse Bertha. Ce projet de journal satirique je le portais depuis plusieurs années et il a pris forme avec l’appui de Cabu et de l’éditeur Jean-Cyrille Godefroy.

Nos moyens étaient dérisoires, des photocopies pour la photogravure, mon ordinateur personnel, un Mac Plus, pour les textes, mon fax pour recevoir les dessins, et pendant plusieurs semaines, outre ma fonction de rédacteur en chef, j’ai fait office de secrétaire de rédaction, et j’ai composé moi-même tous les titres des 12 pages à l’aide de lettres transfert. Avant l’envoi du n°1 chez l’imprimeur j’ai passé une longue nuit blanche seul à relire les textes, maquetter les dessins, faire les corrections. J’étais déjà depuis plus de 24 heures dans cette cave de la rue Quincampoix qui faisait office de bureaux. Seul, à m’assurer que le journal était tel qu’il devait paraître.

Je rêvais de faire un journal de dessinateurs et il était là. J’en ai choisi la mise en page, le papier, et l’équipe de dessinateurs. Il suffit de feuilleter les premiers numéros pour voir que tous ceux que j’avais contactés avaient répondu présent, Cabu bien sûr, mais aussi Gébé, Willem, Siné, Nicoulaud, Cardon, Wolinski, Kerleroux, Vuillemin, Loup, et même Bernar, Honoré, Lefred-Thouron, Tignous, Berth, Kafka, Plantu, Pessin, Faujour et Charb aussi. J’avais même demandé que les dessinateurs mensualisés soient mieux payés que les rédacteurs. C’est dire l’importance que je leur accordais.

Pendant les trois premiers mois où j’ai été à la tête du journal il m’est souvent arrivé de privilégier des dessins en grand format plutôt que des articles pas drôles. Parmi ceux-là il y avait bien évidemment ceux de Philippe Val (arrivé là dans la besace de Cabu) – la guerre c’est mal -, que je coupais de moitié ou qui se perdait opportunément dans les entrailles de l’unique ordinateur. Très vite La Grosse Bertha – dont le n°1 ne devait être qu’un one shot pour tester notre capacité à faire un journal – a rassemblé suffisamment de lecteurs pour continuer à paraître.

Un succès qui a du donner à Philippe Val l’idée de le diriger. Il a d’ailleurs très vite tenté de le faire, mutique ou absent des comités de rédaction, il contactait dans mon dos les membres de l’équipe, flattant les uns, encourageant les autres (qui me le racontaient). Jusqu’au jour où sans doute lassé de voir ses textes brillants, ne pas faire office d’éditorial, ou relégués au fond du journal, il a convaincu son indéfectible ami Cabu que l’hebdomadaire se devait d’avoir deux rédacteurs en chef. Dont un dédié aux textes, devinez qui était pressenti ? Une tentative de putsch assez désagréable, le journal continuait à bien se vendre, une situation intenable pour moi qui m’a valu (après, je l’avoue aujourd’hui, une remarque insolente de ma part) une colère mémorable – dixit Gébé – du gentil Cabu.

J’ai alors donné ma démission et je suis parti – épuisé par trois mois sous pression –mais laissant un journal en état de marche et dont tous les collaborateurs étaient payés. Il m’était impossible de continuer sans avoir la confiance de Cabu – mon idole depuis l’âge de 15 ans – sachant de surcroit qu’il soutenait hélas l’ambition démesurée de Val. Cet arrivisme sera contrecarré par le reste de l’équipe, Henri Montant (Arthur) en tête, qui pendant plusieurs mois l’empêchera d’accéder aux commandes. Lorsqu’il les obtiendra enfin, les ventes de La Grosse Bertha dégringoleront et Jean-Cyrille Godefroy cherchera à reprendre la main sur son journal. La suite on la connaît avec la reparution de Charlie Hebdo.

Voilà, c’est juste une mise au point, Philippe Val a toujours fait carrière en manipulant, en trompant, en volant, en trahissant, tous ceux qui ont servi sa carrière, autant il a réussi à faire revivre Charlie Hebdo et à piller ses caisses, autant une chose est incontestable, il n’est pour rien, vraiment rien, dans la création de La Grosse Bertha et je tenais à l’écrire.

Les dessins ci-dessous qui illustrent ce texte sont extraits de Indélébiles le dernier livre de Luz paru chez Futuropolis.

Trop rares collections de livres de dessins

jeudi 22 février 2018

Les éditeurs publiant des collections dédiées au dessin d’humour ou au dessin de presse satirique se font de plus en plus rares. Parmi eux on peut citer les éditions Lajouanie qui ont édité cinq albums avec des dessins de Deligne, Ranson, Lécroart, Soulcié, ou Ballouhey, cependant aucun autre titre n’est paru depuis 2014.

Le Cherche midi a longtemps publié dans sa collection “La Bibliothèque du dessinateur” de nombreux auteurs, Chaval, Bosc, Mose, Blachon, Gourmelin, Soulas, Kerleroux, Cabu, Wolinski, Tetsu, Morez, Piem, mais ne semble publier aujourd’hui que des albums de Voutch, une belle collection à lui tout seul.

La collection que nous propose Frédéric Pajak avec Les Cahiers dessinés vise l’excellence avec des livres remarquablement bien conçus et un choix d’auteur très écclectique : Gébé, Ungerer, Noyau, Bosc, Chaval, Siné, Tetsu, Topor, Poussin, Pascal, Cardon, Leiter, Laplace, Micaël, Mix & Remix, El Roto. Dernier titre paru L’inconnu de Anna Sommer. Les Cahiers dessinés s’ouvrent aussi à la Bd avec une belle réédition des œuvres de Guido Buzzelli, tome 1.

Autre éditeur, le grenoblois Critères avec sa collection Les Iconovores imaginée par Virginia Ennor et dont chaque volume présente le travail d’un dessinateur accompagné d’une biographie. Huit titres sont déjà parus : Coco, Samson, Camille Besse, Faujour, Pakman, Willem, Gros, Vuillemin. A noter que de nombreuses signatures sont organisées autour de cette collection. Les prochaines auront lieu le jeudi 22 février à la librairie du théâtre du Rond-Point 2, bis avenue Franklin Delanoo Roosevelt, 75008 Paris, à 18h avec Vuillemin, Virginia Ennor, Pascal Gros, Caroline Constant, et le samedi 24 février à La Droguerie de Marine, 66, rue Georges Clémenceau, 35400 Saint-Malo, de 16h à 19h avec Vuillemin, Faujour, et Virgina Ennor.

Dessiner pour Le Canard enchaîné

mardi 20 février 2018

Les dernières signatures de dessinateurs apparues récemment dans Le Canard enchaîné sont celles de Romain Dutreix, Urbs, et Adelinaa. L’hebdomadaire satirique continue à chercher de nouveaux talents pour compenser la disparition dans ses pages des dessins de Cabu, Pétillon, Cardon.

Mais pour illustrer l’hebdomadaire il reste encore les « anciens » Escaro, Kerleroux, Wozniak, Delambre, Potus, Mougey, Kiro, Pancho, et Lefred-Thouron. Ces dernières années ils ont été rejoints par Diego Aranega, Bouzard, Aurel, Vera Makina, mais aussi Lindingre, Lara, Lefèvre, Large, Soulcié, dont les parutions sont cependant plus aléatoires.

En dehors de la cooptation et du parrainage, Kerleroux pour Cabu, Cabu pour Mougey, Pétillon pour Bouzard (en 2012 ce dernier avait intitulé le blog qu’il partageait avec James Ottoprod « On veux travailler pour le Canard »), Wozniak pour Adelinaa, il n’est pas évident de rejoindre la confrérie des dessinateurs du Canard. D’autant que les critères de sélection des dessins par la rédaction sont pour beaucoup d’auteurs très mystérieux. Reste l’obstination des dessinateurs qui chaque lundi et mardi matin, jours de bouclage du journal, envoient des dessins dans l’espoir qu’ils seront publiés. Quelques-uns ont cette chance.

A noter que Le vénérable journal, 100 ans en 2016, a également un site Internet. Cependant on n’y trouve que la Une de l’hebdomadaire, des informations sur Les Dossiers du Canard, l’autre publication des éditions Maréchal-Le Canard enchaîné, et les conditions d’abonnement.

Illustration : Romain Dutreix par ailleurs dessinateur à Fluide glacial et auteur avec Toma Bletner de « Revue de presse – Petite histoire des journaux satiriques et non-conformistes » (Fluide glacial).

L’affaire de la caricature antisémite de Macron

vendredi 17 mars 2017

Avec l’affaire de la caricature antisémite d’Emmanuel Macron, le candidat à la Présidentielle François Fillon semble s’être offert une campagne de communication à peu de frais, fustigeant et sanctionnant publiquement ses équipes.

caricature-de-macron-publiee-ce-vendredi-sur-le-compte-twitter-officiel-de-les-republicains_5841215En effet, il n’y a rien d’antisémite dans ce dessin d’E.Macron sorti de son contexte pour illustrer un graphique publié par le parti Le Républicains. Les médias ont vite monté « l’affaire » en mayonnaise répétant à l’envi que ce dessin était antisémite. Le Figaro écrit : « Censé incarné l’offensive de la droite contre Emmanuel Macron, un visuel diffusé vendredi sur le compte Twitter des Républicains a provoqué l’indignation des internautes. En représentant Emmanuel Macron en banquier en haut de forme et au nez crochu, faucille soviétique en main, le parti de François Fillon voulait dénoncer son passé dans la finance et les nombreux ralliements venus de la gauche, notamment de l’ancien premier secrétaire du Parti communiste, Robert Hue. Mais les internautes y ont vu une ressemblance avec les caricatures antisémites des années 30. »

Et L’Express en rajoute : « De nombreux internautes et commentateurs trouvent que le dessin reprend les codes visuels de l’antisémitisme des années 30. Et ce, d’autant plus qu’Emmanuel Macron a été banquier d’affaires de 2008 à 2012 chez la banque d’affaires Rothschild, souvent ciblée par des écrits antisémites. » (sic)

Xav MacronOr si l’on regarde l’original d’où a été tiré ce dessin (ci-contre), le dessinateur représente un Macron habillé en patron qui commente le ralliement d’un communiste à son mouvement. Si le dessinateur utilise les stéréotypes du chapeau claque et du cigare aucun autre élément n’évoque une allusion antisémite.

Quant à la forme du nez elle cherche juste à être caricaturale à partir du modèle. Kerleroux dessinateur du Canard enchaîné racontait qu’il y a quelques années il recevait des lettres d’insultes lorsqu’il représentait sans aucune arrière pensée un patron avec un nez par trop busqué ou bourbonien.

Désormais il faudra se faire à l’idée (ou pas) que les dessins de presse sont mal lus, interprétés, et manipulés pour en faire des sujets à polémiques. On l’a vu ces derniers temps avec Charlie Hebdo (dessins de Riss, Félix) accusé de tous les maux juste pour avoir fait de l’humour, un peu noir, sur des faits d’actualité. L’étau du politiquement correct se resserre doucement sur la satire un des derniers symboles de la liberté d’expression, il faudrait peut-être garder nos indignations pour de vrais motifs.

Xav dessine pour le site Internet de Les Républicains où il est présenté ainsi : « Xav est dessinateur de presse depuis plus de 20 ans. Il a travaillé pour la presse, pour l’édition, pour des sites Internet et pour de nombreux blogs. »

C6kYm2qWYAA_LFsIronie de la chose on peut lire quelques lignes au-dessus : « C’est parce que les événements peuvent être graves et que leur interprétation est souvent complexe qu’il faut savoir en rire. Cette rubrique sera régulièrement illustrée pour vous offrir un regard original et impertinent sur l’actualité qu’elle soit politique, sociale, économique mais aussi culturelle, médiatique et internationale. »

Au final, le dessin a été remplacé par une photo.

Merci à E.L.