Fait d'images

le blog de françois forcadell – l'image dessinée dans l'actualité

Archive pour le mot-clef ‘Gébé’

Cavanna François

samedi 8 novembre 2008

cavanna1On s’arrache Cavanna. 86 ans le 22 février 2009. Il y a quelques semaines il co-signait avec Stéphane Mazurier et Delfeil de Ton (de Siné Hebdo) Les belles images d’Hara-Kiri (Hoëbeke), aujourd’hui paraît en kiosque un hors-série exceptionnel de Charlie 6€ Hebdo qui lui est entièrement consacré.

Cavanna raconte Cavanna est un document formidable (en dehors de la préface de Philippe Val qui ne glorifie que ses moustaches ?!) car il retrace une vie riche des multiples talents de Cavanna : journaliste, âme des éditions Hara-Kiri, dessinateur (on découvre ses premiers dessins), rédacteur-en-chef inventif et rigoureux, découvreur de talents (il nous offre des portraits de Fred, Choron, Cabu, Gébé, Wolinski, Willem), écrivain à succès, préfacier universel, et encore aujourd’hui chroniqueur à Charlie Hebdo.

Avec le Pr Choron, autre monument dont un film célébrera le 7 janvier la mémoire, il a su inculquer à des milliers de lecteurs un mauvais esprit et un humour indispensable à toute intelligence humaine.

Il est aussi heureux que cet hommage lui soit rendu de son vivant. D’ailleurs, la publication de ce hors-série accompagne l’exposition éponyme qui sera présentée à Nogent-sur-Marne, sa ville natale, du 15 novembre au 31 mai 2009.

Sacrée poupée

jeudi 30 octobre 2008

tete-de-noeud-presidentUne poupée vaudou à l’effigie dessinée de Nicolas Sarkozy, président de la République française, vendue en librairie dans un coffret, a déclenché les foudres judiciaires du locataire de l’Élysée. Les magistrats du Tribunal de Paris l’ont débouté en déclarant : “la diffusion de la poupée litigieuse ne caractérise pas une atteinte fautive à son droit à l’image”.

D’après Le Monde (30.10.08) qui relate l’affaire « Les juges estiment au contraire “que la caricature et la satire, même délibérément provocante ou grossière, participent de la liberté d’expression et de communication des pensées et des opinions”.

Si, selon eux, “le droit à l’humour connaît des limites”, ces dernières n’ont pas été dépassées par les éditions K & B, auteurs de l’ouvrage Nicolas Sarkozy, le manuel vaudou, vendu avec la poupée. Les juges considèrent qu’ils n’ont pas “à apprécier le bon ou le mauvais goût du concept proposé”. “Il s’agit d’une œuvre de l’esprit, composé de deux supports indissociables”, qui visent “à brocarder des idées et prises de position politiques, comme des propos et comportements publics, en guise de protestation ludique et d’exutoire humoristique”, soulignent-ils dans leurs attendus. »

Plus jamais ça - Une Charlie Hebdo par GébéÀ noter que Ségolène Royal, qui elle aussi a eu droit à sa poupée, a déclaré à propos du jugement (après avoir été tentée de porter plainte) : “C’est la protection d’une liberté de caricaturer les puissants de ce monde”.

Toujours selon Le Monde, l’avocat du président aurait prononcé cette phrase : “Le droit à l’humour existe en matière de diffamation, mais pas en matière de droit à l’image”. Une affirmation péremptoire que tous les caricaturistes vont sans doute devoir méditer avant de s’exprimer. L’avocat de Nicolas Sarkozy a fait appel.

Illustrations : couvertures du Charlie Hebdo (1974) dessinées par Gébé
et représentant Georges Pompidou et Valéry Giscard d’Estaing,
tous deux présidents de la République. 

(D’autres couvertures de L’hebdo Hara-Kiri, Charlie Hebdo
et du mensuel Hara-Kiri, sur ce site Un vrai régal.)

Hara-Kiri revient !

mercredi 1 octobre 2008

Hara Kiri - Les belles images 1960-1985L’humour « moderne », caustique et déjanté, celui qu’on trouve aujourd’hui dans la publicité, à la télé, où au cinéma, a été « inventé » par Hara-Kiri mensuel. Un magazine iconoclaste qui fût pendant plus de vingt ans une véritable pépinière de talents : Pr Choron, Cavanna, Fred, Topor, Gébé, Cabu, Wolinski, Reiser, Fournier, Guy Pellaert, Jean-Marie Gourio, DDT, Willem, Vuillemin, Lefred Thouron, Alex Barbier, Placid, Carali, Kamagurka, sans oublier les photographes Chenz, Xavier Lambours et Arnaud Baumann.

Le seul journal où on pouvait voir Michel Drucker, Coluche, Romain Bouteille, Miou-Miou, Patrick Font, Carlos, Eddy Mitchell, Marcel Amont, Bashung, Gérard Lanvin, Thierry Le Luron, Danièle Gilbert, Pierre Perret, etc., etc., faire de la figuration dans des roman-photos joyeusement imaginés et mis en scène par le Pr Choron et Gébé.

Ils se sont amusés, ils ont choqué, ils ont fait tomber nombre de tabous, mais ils ont surtout démontré que l’humour peut être sans limites dès qu’il est inventif.

On retrouve une partie de cette abondante production dans Hara Kiri Les belles images, 1960 – 1985, signé conjointement par Cavanna, Stéphane Mazurier , Delfeil de Ton et Michèle Bernier (fille d’Odile Bernier et du Pr Choron).

Album de 320 pages, format 235 x 305 mm, 32 €.

Sortie en librairie le 16 octobre 2008. Un album indispensable avec Les Unes de Reiser (Drugstore) et Les colonnes de Gébé (L’association).

Gébé revient !

mercredi 24 septembre 2008

Il y a déjà quatre ans Gébé nous quittait. Celui que Jean Frapat qualifiait de « rêveur magnifique » et dont Cavanna disait : « Quand il s’agit de Gébé, on ne sait pas trop quoi dire. Il y a trop à dire. Par quel bout commencer ? D’abord des bouts, il y en a partout qui dépassent. Sur lequel tirer ? ».

Les colonnes de GébéDessinateur et rédacteur en chef d’Hara-Kiri, dessinateur à Charlie Hebdo, Charlie mensuel, auteur de romans, de textes de chansons, auteur de textes pour France Culture, de scénarios de films, de romans-photos, réalisateur de courts-métrages, auteur de sketches pour les émissions Merci Bernard, Palace et les Nuls de Canal +. Gébé a aussi été dessinateur et responsable des dessins à L’Idiot international. Il a dessiné pour La Grosse Bertha dont les avatars ont engendré en 1992 la reparution de Charlie Hebdo, hebdomadaire dont il a été le directeur et un des principaux dessinateurs pendant 12 ans.

On ne dira jamais assez l’apport de Gébé à la presse et à l’humour. Non seulement il a été un immense créateur, mais il a aussi été un grand « découvreur » de talents ouvrant les pages de ses journaux a des dessinateurs comme Vuillemin, Lefred Thouron, Kamagurka, entre autres, renouvelant ainsi le genre pour des années.

Difficile pourtant de résumer un parcours aussi riche sans parler de son goût pour l’écriture. Ce sera Reportages, publié aux éditions du Square en 1973, réédité revu et complété par Le Dilettante en 2001 sous le titre Reportages pas vraiment ratés. Puis Sept cartouches. (Hachette) et Roman d’une année sabbatique (Le Pré aux Clercs. 1988). En 1992, il publie Les Résistants du square (Presses de la Cité), un début d’autobiographie. Un dimanche au frais sera son dernier roman (Le Cherche Midi. 1996).

L’Association a aujourd’hui l’excellente idée de publier ses chroniques parues dans Charlie Hebdo de 1993 à 2003. L’occasion de retrouver le grand Gébé, qui, interrogé en 1989 sur ses projets par André Baur répondait :

« Mes projets, c’est le matin. Je me lève même s’il pleut, s’il neige, s’il vente, s’il fait froid. Le matin c’est fabuleux ! Le premier café, la première cigarette… C’est là que j’ai tous mes projets dans ma tête. Quand je me lève le matin, j’ai envie de tout faire : de l’architecture… tout ! ».

Gébé nous manque, et je ne parle même pas de ce qu’il aurait pu dire de la polémique entre Siné et Val. ff

Autre livre indispensable pour découvrir Gébé (en dehors de tous ses albums et textes) : Un pas de côté publié en 2003 par Frédéric Pajak aux éditions Buchet Chastel.

Du 30 septembre au 2 novembre, La mer à boire présente une exposition des originaux de l’album Les colonnes de Gébé. En collaboration avec L’Association.

La mer à boire, 1/3 rue des Envierges 75020 Paris. 01 43 58 29 43. 
Ouvert du mardi au samedi de midi à 1h et dimanche de midi à 18h
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Le site la mer à boire.

Siné homme de presse

jeudi 28 août 2008

siné massacre n°9Siné Hebdo est le quatrième journal créé par Siné. Dessinateur rebelle, mais également graphiste émérite, son parcours professionnel est jalonné de lancement de titres qui font désormais parti de l’histoire de la presse.

Le premier est Siné Massacre qui voit le jour en 1962. À l’époque, il vient de quitter L’Express où ses dessins très anticolonialistes suscitent, en pleine guerre d’Algérie, de sérieux remous. Neuf numéros sont publiés autour de thèmes aussi variés que De Gaulle, les pieds noirs, la liberté de la presse, l’amour, le pape, le colonialisme.

L'enragéQuelques années plus tard naîtra L’Enragé, véritable brûlot éditorial publié au cœur des événements de 1968 et qui prend pour cible le pouvoir du général de Gaulle (L’Enragé est l’anagramme de général). L’Enragé publie les premiers dessins politiques de Cabu, Wolinski, Willem, Pétillon, Loup, Blachon, Topor, Cardon, Bosc, Soulas, Reiser. Lancé avec l’aide de l’éditeur Jean-Jacques Pauvert, il atteint les 100 000 exemplaires vendus à la criée.

Après les évènements, L’Enragé donne l’idée à l’équipe du mensuel Hara-Kiri de créer un hebdomadaire dédié à l’actualité. Ce sera L’hebdo Hara-Kiri qui devient après son interdiction Charlie hebdo. Siné y dessine et tient sa rubrique Siné sème sa zone jusqu’à la disparition du journal en 1981. C’est aussi au sein de cette équipe qu’il créera le titre Mords’y l’œil, véritable prouesse technique dont il assure lui-même la mise en page et la mise en couleur des dessins de Reiser, Cabu, Gébé, Willem, Wolinski.

Après la mort de Charlie, Siné se défoulera à Droit de réponse, l’émission de Michel Polac, dans l’hebdomadaire La Grosse Bertha, avant d’intégrer l’équipe de la nouvelle version de Charlie hebdo en 1992.

mors-y l'oeilIl faudra attendre son licenciement de Charlie hebdo pour soupçon de soupçon d’antisémitisme en juillet 2008 pour qu’il se lance, à 80 ans, dans une nouvelle aventure éditoriale.

Siné est un des rares dessinateurs à ériger la provocation en système de pensée, à cultiver l’irrespect absolu, le parti-pris, la mauvaise foi consciente, et surtout à ne faire aucune concession après plus de 60 ans de métier. En créant Siné hebdo il reste fidèle à lui-même. f.f.

Illustration : Dessin de Siné paru
dans Mords-y-l’oeil n° 3 en avril 1981.

Le site du journal Siné Hebdo

Siné viré de Charlie, suite des suites

jeudi 24 juillet 2008

Les annees charlieA ce jour (24.7.2008) quelques 1900 signatures de soutien à Siné viré de Charlie hebdo par Philippe Val sont venues se rajouter à la pétition initiale de 2000 signatures. Parmi les noms de la première liste on peut remarquer de nombreux confrères mais aussi Nicole Blondeaux, femme de Gébé, celle de Patrick Font ex-complice de scène de Val, et de Isabelle Soulié, ex-femme de Cabu.

La décision de licenciement ne fait d’ailleurs pas l’unanimité dans la rédaction de l’hebdomadaire puisqu’on retrouve dans la pétition les signatures de Willem et Tignous et que, d’après nos informations, les « historiques » du titre Cavanna, Wolinski, ainsi que certains dessinateurs, n’approuveraient pas tout à fait la décision de P. Val

Nul doute que le comité de rédaction du jeudi 24 juillet risque, pour une fois, d’être animé.

Delfeil de Ton, ancien de Charlie hebdo, le « vrai », prend lui aussi position dans un billet publié sur le site de l’Obs à propos de la mainmise de P. Val sur le journal (extrait) :

«Dans notre monde libéral, les idées finissent toujours par appartenir à ceux qui ne les trouvent pas.»

La sentence de M. Philippe Val, penseur contemporain, figurait donc en couverture du numéro 1 du nouveau «Charlie-Hebdo». En 2004, lorsque parut un livre, «Les Années Charlie, 1969-2004», qui prétendait retracer l’histoire du journal, cette couverture y fut republiée sur une pleine grande page mais la sentence n’y figurait plus. Le court texte, dans lequel elle se trouvait, avait été supprimé. C’est ainsi qu’on fait l’histoire, au nouveau «Charlie-Hebdo».

C’est pourtant la pensée la plus juste du penseur contemporain mais c’est aussi que le penseur, qui n’a pas trouvé cette idée qui s’appelle «Charlie-Hebdo», pas plus qu’il n’a trouvé cette idée d’appeler un journal «Charlie», cette idée lui appartient aujourd’hui grâce au monde libéral où il navigue avec une si remarquable aisance.

Ces choses, je n’avais jamais pris la peine de les dire. Je me soucie de ce Charlie-Ersatz comme d’une guigne, je ne le lis pas. DDT. »

Plantu - L'expressPlantu, lui, consacre sa page de L’express à l’affaire avec un dessin à la Siné où l’on voit un Philippe Val affublé d’un brassard qui botte le cul de Siné et surmonté de la légende « Charlie le journal où on peut tout se permettre même virer un dessinateur ». A voir en grand format sur le site de soutien.

A noter sur le même site la chronique hebdomadaire de siné qui n’a pas été publiée par Charlie mais que plusieurs sites Internet, dont le Nouvelobs.com, diffusent. Siné y expose sa version de l’affaire et parle notamment de Charb, rédacteur en chef adjoint de Charlie qu’il considérait jusqu’alors comme son « neveu » et qui a pris fait et cause pour P. Val.

Autre personnalité à avoir apporté son soutien à P. Val, Bernard Henri Levy, le philosophe, qui dans un grand article alambiqué publié dans Le Monde (23.7.2008) justifie l’antisémitisme supposé du texte de Siné.

A suivre.

le site de soutien à Siné